2025 : faisons un rêve

par Laurent Joffrin |  publié le 01/01/2025

Pour éviter les palinodies délétères qui viennent d’occuper les six derniers mois, les partis rationnels doivent trouver les voies et moyens d’un compromis. Perspective naïve et invraisemblable ? Oui. Mais l’alternative, c’est la crise toujours recommencée.

Laurent Joffrin

Est-il permis, une fois dans l’année, de faire preuve de candeur ? D’imaginer, par exemple, que la classe politique, et notamment les partis rationnels, trouvent la porte étroite qui leur évite de retomber à brève échéance dans une crise gouvernementale hautement dommageable au pays ?

Dans le principe, la solution est simple à énoncer : centre, droite et gauche de gouvernement trouvent un compromis honorable qui leur permette de surmonter l’épreuve du vote sur le budget, mélange raisonnable de recettes nouvelles et de dépenses qui préservent les services publics et la nécessaire mutation écologique, sans pour autant taxer la production et sacrifier la compétitivité. La droite accepterait, dans cette hypothèse, qu’on mette à contribution les très hauts revenus et la gauche qu’on prévoie certaines économies budgétaires.

Une fois l’obstacle franchi, les mêmes parties prenantes à un accord de non-censure ouvriraient une négociation sociale qui réunirait patronat et syndicats pour aménager – et non abroger – la réforme des retraites, de manière à la rendre plus juste, sans négliger les équilibres financiers qui s’imposeront de toutes manières à n’importe quel gouvernement. Le pli du compromis étant pris, on peut ensuite tabler sur un débat transpartisan pour faire passer certains projets, tels que la loi sur la fin de vie, ou bien l’indispensable plan de lutte contre le narcotrafic.

Cette méthode ayant fait ses preuves, on peut dès lors envisager que ces accords ponctuels se répètent pour faire face aux défis variés qui attendent le pays, quitte à ce que les forces en présence abandonnent une partie de leurs exigences pour faire avancer les autres. Dès lors, il devient possible de respecter les échéances électorales normales, ce qui laisse le temps à la majorité relative et à l’opposition (tout aussi relative) de travailler à des projets pensés et utiles et de préparer une candidature crédible à la présidentielle. Ainsi les électeurs seraient appelés à trancher les différends de fond qui opposent la droite et la gauche, lesquels auraient été, en quelque sorte, mis en veilleuse pour franchir la passe dangereuse.

Tout lecteur, à ce stade, réagira en remarquant qu’il s’agit bien d’un rêve et que le débat public, par sa hargne et son dogmatisme, ne nous engage en rien sur cette voie raisonnable. Mais il devra se souvenir que faute d’un scénario de ce genre, qui découle du rapport de forces réel à l’Assemblée, la vindicte de partis irresponsables nous mènera à un nouveau paroxysme dans le désordre et le tumulte, faisant ainsi le lit des partis extrêmes et amenant pratiquement à coup sûr l’un ou l’autre populisme au pouvoir. Si c’est ce que l’on souhaite, qu’on le dise tout de suite…

Laurent Joffrin