Après Gaza, objectif Cisjordanie

par Pierre Benoit |  publié le 01/03/2025

Tandis que la trêve conclue avec le Hamas a passé sa première phase, le gouvernement Netanyahou accentue sa pression annexionniste sur la Cisjordanie.

Des véhicules de l'armée israélienne patrouillent dans les rues lors du raid de Tsahal sur le camp de réfugiés de Balata à Naplouse, en Cisjordanie, le 27 février 2025. Des affrontements armés ont été signalés dans le camp. (Photo de Nedal Eshtayah / Anadolu via AFP)

Quatre corps ont été rendus à Israël le 27 février, dont celui du Franco-Israélien Ohad Yahalomi, dans le cadre de la dernière phase de la trêve conclue entre Jérusalem et le Hamas. Enlevé dans le kibboutz de Nir Oz lors de l’attaque terroriste du 7 octobre, il était le dernier Français retenu dans la bande de Gaza.

Le retour des quatre dépouilles coïncide avec la libération de plus de 600 détenus palestiniens. En principe, ce huitième échange signe la fin de la première phase du cessez-le-feu entamé le 19 janvier. Depuis lors, 25 otages vivants et 8 morts ont été restitués à Israël contre 1700 détenus palestiniens.

La seconde phase de la trêve commence le 2 mars, les négociations démarrent à peine au Caire. Cette nouvelle étape doit conduire au retrait total des forces israéliennes, à la libération des derniers otages, ils sont 62 dont 35 présumés morts selon l’armée israélienne. Le Hamas a fait savoir qu’il était prêt à rendre tous les kidnappés en une seule fois. L’élargissement de tous les otages conduirait à une troisième phase, celle d’un retour à un contrôle palestinien sur l’enclave.

Le premier ministre Benyamin Netanyahou exige toujours le désarmement complet du Hamas et sa disparition de tous les postes de responsabilité. Bien que fortement diminué, le Hamas tient toujours la rue à Gaza. On a vu les images des milices posant en uniforme, les armes à la main, à chaque libération d’otage. Un échec pour Netanyahou.

Plus que jamais, les ministres d’extrême droite de la coalition pressent Netanyahou de reprendre les combats. Les frappes ponctuelles n’ont pas vraiment été suspendues sur l’enclave. Et tandis que le monde entier découvre la vidéo diffusée sur Truth-Social où le champ de ruine de Gaza a été transformé par la magie de l’IA en station balnéaire de luxe avec Trump et Netanyahou sur des transats, la guerre prend une tout autre ampleur en Cisjordanie occupée.

Il y a vingt-deux ans que les chars n’étaient pas entrés dans la ville de Jénine, au nord de la Cisjordanie. Deux jours après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu sur Gaza, le 21 janvier, les blindés israéliens ont encerclé le camp palestinien et fait sortir les habitants. Jour après jour les raids et les expulsions se sont amplifiés. Au début février, ce fut à la ville de Tulkarem de subir le même sort. Des drones munis de haut-parleurs ont survolé les quartiers enjoignant les familles à quitter leurs maisons en une demi-heure.

Plus tard, le camp de Nour Shams, en lisière de Tulkarem était visé de la même façon. Les habitants ont dû se réfugier dans un centre d’accueil monté à la hâte non loin de la ville par le Croissant-Rouge palestinien. Lorsqu’on les interroge, ces déplacés n’hésitent pas à dire qu’ils vivent les expulsions comme une seconde « Nakba », référence à l’expulsion quelques 700.000 palestiniens en 1947, dans la foulée de la proclamation de l’État d’Israël et de la guerre déclenchée par les puissances arabes.

En un mois, quarante mille palestiniens ont été expulsés de chez eux dans le nord au prix de quelque soixante victimes. Le ministre de la défense Israël Katz n’a jamais caché ses opinions annexionnistes. C’est lui qui annoncé le chiffre de 40.000 en ajoutant : « j’ai donné des instructions (aux soldats) de se préparer à un séjour prolongé dans les camps, de ne pas permettre le retour de leurs habitants, ni la résurgence du terrorisme ». On ne saurait mieux dire que l’annexion de la Cisjordanie est en marche alors même que l’avenir de l’enclave gazaouie reste incertaine.

Après avoir interdit à l’Agence de l’Onu pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) d’opérer en Israël et à Jérusalem-est, il n’y a aucun doute sur la volonté de l’équipe Netanyahou de faire disparaitre le statut même de réfugié palestinien. Sans réfugié, plus personnes ne sera éligible à recevoir des soins, à bénéficier d’une éducation. Objectif : rendre impossible la vie des Palestiniens.

Pierre Benoit