Attentat : le monde parallèle de Donald Trump

par Laurent Joffrin |  publié le 02/01/2025

Une nouvelle fois, celui qui devient ces jours-ci président de la première démocratie du monde, a démontré que le mensonge était son arme favorite.

Laurent Joffrin

Comme toujours en semblable circonstance, Donald Trump a tout compris du dernier événement tragique qui a endeuillé son pays, l’attentat de La Nouvelle Orléans à la voiture-bélier. Sur son réseau Social Truth, il en a fait part à ses compatriotes : « C’est ce qui se passe quand vous avez des FRONTIERES OUVERTES avec un leadership faible, inefficace, et pratiquement inexistant », ajoutant que les États-Unis étaient « la risée du monde entier ». Il avait déjà déclaré que « les criminels qui arrivent sont bien pires que les criminels que nous avons dans notre pays ». Il a enfin fait le lien avec les différentes affaires judiciaires dans lesquelles il était poursuivi ces deux dernières années, arguant qu’elles avaient détourné la justice de la poursuite des vrais criminels.

Détail intéressant : Shamsud-din-Jabbar, l’auteur de cet effroyable attentat, qui a coûté la vie à quinze personnes au moins, n’est pas un migrant. Il est né aux États-Unis, c’est un ancien militaire américain converti à l’islam, qui s’est radicalisé en fréquentant les réseaux sociaux. Il n’a donc aucun rapport avec « LES FRONTIÈRES OUVERTES », ni avec la faiblesse supposée du leadership américain, ni avec les poursuites judiciaires menées contre Donald Trump, dans la mesure où il n’avait auparavant commis aucun délit. Citoyen américain, il n’aurait pas été plus concerné par la vaste opération d’expulsion des migrants irréguliers que Trump projette pour les mois qui viennent.

Le président élu, qui prend ses fonctions dans quelques jours, a donc raconté n’importe quoi sur cet attentat, sans attendre les éléments de l’enquête, ou sans en tenir le moindre compte. Il avait déjà accusé pendant sa campagne, les réfugiés haïtiens de Springfield (Ohio) de « manger des chats et des chiens », sur la base d’une rumeur fantaisiste qui circulait sur les mêmes réseaux sociaux. Bizarrement, peu de gens ont souligné qu’avec ce genre de déclaration, le président élu jetait honteusement l’opprobre sur les migrants en général et sur les cinq millions de musulmans qui vivent aux États-Unis, dont la moitié sont nés dans le pays.

Au fond, à force d’outrances ridicules et de mensonges énormes, Trump a réussi à mithridatiser l’opinion américaine, du nom de ce roi de l’antiquité, Mithridate, qui avalait chaque matin une dose de poison pour arriver à l’immunité : il peut dire n’importe quoi, il n’en souffre aucun dommage politique. Au contraire, on peut même avancer que sa sortie sur les Haïtiens de Springfield lui a bénéficié : par les réactions qu’il a suscitées à l’époque, il a remis la question de l’immigration au centre de la campagne présidentielle.

Il en va désormais ainsi dans la première démocratie du monde : le mensonge, même s’il est aussitôt réfuté avec éclat par les faits, est devenu une arme décisive dans la politique, qui profite à celui qui le profère, même quand il est confondu. Et il y a toujours en France des adeptes des « vérités alternatives » pour défendre Trump ou pour lui trouver des circonstances atténuantes…

Laurent Joffrin