Au secours, Macron revient !

par Valérie Lecasble |  publié le 13/05/2025

Alors qu’il connaît un léger regain de popularité, le président de la République a voulu vanter les mérites de son bilan. Loin de convaincre, il s’est montré déstabilisé, sans que l’éventualité d’un référendum suffise à changer la donne.

Le président Emmanuel Macron, dans une émission spéciale de la chaîne TF1, le 13 mai 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)

A-t-on le droit de dire qu’on n’a pas envie d’écouter Emmanuel Macron ? Pas envie de le revoir dérouler ses arguments que l’on connaît par cœur depuis huit ans, pas envie de réécouter un président de la République qui justifie tout, dans le détail et sans fin, sur tous les sujets.

Soyons justes, il tient la rampe sur les sujets internationaux. Il est certes anxiogène, tant il nous fait comprendre que la guerre est à nos portes, que la France n’est pas préparée à un conflit terrestre de haute intensité, et qu’elle détient dans la dissuasion nucléaire le pouvoir d’étendre ou non « la dimension européenne de nos intérêts vitaux » déjà proclamée par le général De Gaulle. Mais il pose une bonne question quand il veut ouvrir des discussions avec le reste de l’Europe, pour savoir si, comme le font les Américains, les Français fourniront des bombes nucléaires aux avions belges, italiens, ou d’autres nationalités comme par exemple les Polonais qui l’ont demandé. « Si les européens veulent rester libres, ils doivent rester armés et solidaires », conclut-il sur l’Ukraine qu’il veut forte pour protéger l’Europe.

Mais pour le reste, Emmanuel Macron est tel qu’en lui-même : depuis huit ans, il assure avoir eu raison sur toute la ligne. Il ne s’est trompé sur rien ou presque, il a mené la meilleure politique possible et s’il y a eu des erreurs ou des difficultés, c’est la faute des autres, de la crise industrielle européenne ou bien celle de ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy et François Hollande qui auraient, selon lui, tué l’emploi industriel. Tout juste apprend-on qu’il ne nationalisera pas ArcelorMittal parce que cela ne servirait à rien – même si on a nationalisé EDF pour sauver le nucléaire – et qu’il vaut bien mieux protéger le marché européen de l’acier du dumping de l’Asie du Sud-Est.

A l’en croire, il n’est pour rien non plus, ni dans le poids des dépenses publiques, ni dans celui de la dette. Tout est la faute du Covid qui a surenchéri le coût de l’hôpital public puis fait exploser l’insécurité et avec elle le nombre des policiers à embaucher. Il renvoie au conclave qui continue à réunir le Medef et la CFDT, la responsabilité d’une solution pour les retraites. Sans surprise, il refuse tout référendum qui viserait à abroger la réforme des retraites même si on peut, assure-t-il, jouer sur la durée de cotisations. Il demande aussi au gouvernement d’ouvrir avec les partenaires sociaux le chantier d’une conférence sur le financement de notre modèle social qui repose trop sur le travail. « Vous avez fait un exercice de communication présidentielle sur votre bilan sans annoncer la moindre mesure aux travailleurs », lui lance à juste titre la leader de la CGT, Sophie Binet.

Après deux heures, scotchés devant le poste de télévision, le sentiment se diffuse : on devient plus attentif aux questions posées par les intervenants qu’aux réponses données par Emmanuel Macron. Celles de Sophie Binet bien sûr, particulièrement pertinentes mais aussi, à droite, celles d’Agnès Verdier-Molinié qui lui prouve par A + B que la France croule sous le poids de ses dépenses publiques. Celles ensuite de Robert Ménard qui pointe l’inefficacité d’une police municipale qui ne peut pas utiliser les drones sans avoir prévenu qu’elle s’apprête à le faire, ce qui lui ôte toute efficacité.

Tant et si bien que l’élève Macron se retrouve contraint de répondre, point par point, peinant à convaincre, sous le feu des longues critiques de ses interrogateurs. Le show n’est plus celui du président de la République mais celui de Robert Ménard, journaliste, chroniqueur qui pose la question que se posent tous les français : pourquoi, sur la sécurité, comme sur les autres sujets abordés, Emmanuel Macron n’a-t-il rien fait depuis huit ans ? « Vous vous trompez », ose lancer le maire de Béziers qui accapare le débat. A cet exercice, Emmanuel Macron a perdu en une seule soirée la stature de leader de l’Europe qu’il avait mis neuf mois à reconstruire après sa désastreuse dissolution.

Il faut attendre la fin de l’émission pour qu’il annonce enfin ce que l’on attendait depuis le début, à savoir une consultation à questions multiples dans le champ de l’article 11 de la constitution, celui du référendum, comme par exemple l’interdiction des réseaux sociaux aux moins de quinze ans, en imposant aux opérateurs un contrôle d’âge… avant de reconnaître qu’une telle décision ne peut se prendre qu’au niveau européen. Quant à la fin de vie, le « référendum peut être une voie » s’il devait y avoir un « enlisement » au Parlement. Ouf ! Voici enfin l’essentiel. Même s’ il reste parsemé de points d’interrogation.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique