Bayrou sonne le tocsin
Depuis vingt ans, affirme le Premier ministre, la France vit une dégringolade que le Covid a accélérée : désindustrialisation, perte de productivité, déficits du budget, du commerce extérieur et de la sécurité sociale, emploi en recul chez les jeunes et les seniors. Alerte !

Tâche pour le moins ardue : François Bayrou veut préparer les Français à des décisions difficiles et, au passage, éviter la censure. Une seule solution à ses yeux : sonner le tocsin. Là où la plupart des politiques cherchent à minimiser le danger, il invoque… Trotski et l’adage selon lequel « seule la vérité est révolutionnaire ».
La vérité ? Elle tient en quelques graphiques qu’il a brandis comme autant de signaux de détresse. Car à examiner les chiffres, tous les indicateurs sont dans le rouge. Le PIB par habitant se situe au bas du tableau européen. Il est inférieur de 10% à celui de l’Allemagne, de 20% à celui des Pays-Bas et de 30% à celui des États-Unis. Le commerce extérieur est déficitaire de 100 milliards d’euros par an, tandis que celui de l’Allemagne et de l’Italie sont excédentaires.
Les ressources françaises sont à l’image de sa production : insuffisantes. La France sait fabriquer des fusées et des satellites, des trains remarquables et les meilleurs avions du monde, elle domine les productions agricoles. Mais elle ne sait plus fournir les produits de base que consomment les Français : il faut réindustrialiser d’urgence le pays.
Or c’est le travail qui fait la production. Et là, patatras ! Les Français ne travaillent pas assez. Les jeunes et les seniors ont en France un taux d’emploi plus faible qu’en Allemagne ou au Royaume Uni : ils entrent plus tard sur le marché du travail et en sortent plus tôt. Pas assez de production surtout depuis la crise du Covid, ni assez de travail et trop de dépenses publiques pas toujours à bon escient. Avec 57 % de son PIB, notre pays est recordman du monde des dépenses et seulement seizième pour son niveau de vie.
Au Canada, en Suède ou aux Pays-Bas où les dépenses publiques ont été contenues, on se dit plus heureux tandis que 64 % des Français restent pessimistes. Et de lancer : à dépenses publiques maximales, moral minimal. L’excès des dépenses ne fait pas le bonheur des peuples.
Il faut dire qu’avec 50 000 euros par Français, le poids de la dette pèse lourd dans la balance : 100 milliards en 2029 et même peut-être davantage si les taux d’intérêt devaient s’accroître en raison d’une dégradation de la note de la France. Politiquement insoutenable et moralement inacceptable de laisser à nos enfants un héritage grevé d’une dette de facilité, dont le seul objectif est de financer les dépenses courantes.
Le constat est donc clair : cela ne peut plus durer. D’autant que c’est sur les actifs salariés que pèse l’essentiel de l’effort. Ceux-ci financent les dépenses – santé, retraites – tandis que les plus âgés, dont le nombre ne cesse d’augmenter, en bénéficient. Le modèle social français hérité du Conseil National de la Résistance est en danger. Pour le sauver, il faut affronter le défi démographique où de moins en moins d’actifs financent de plus en plus de retraités. Et réinventer notre système collectif qui repose sur la solidarité intergénérationnelle.
Construire une défense autonome, refuser le surendettement, refonder l’action publique et garantir la vitalité économique du pays sont les quatre axes d’une action qui vise à proposer des solutions pour le 14 juillet, avant le départ en vacances des Français. Le temps de négocier avec les députés pour espérer que le Parlement ne censure pas le budget 2026 à la rentrée. L’ascension de l’Himalaya est loin d’être achevée…