Espionnage : Des taupes en toc

le journaliste du quotidien français "Le Monde", Jacques Follorou, le 5 septembre 2013. lors de la première audition sur la commission d'enquête sur la surveillance électronique de masse des citoyens de l'UE par l'Agence nationale de sécurité américaine au siège de l'UE à Bruxelles. (Photo de JOHN THYS / AFP)

Je lis Le Monde depuis des décennies. Non que je sois en accord avec tout ce qui y est écrit. Il serait d’ailleurs stupide de ne lire un journal que parce qu’il conforte vos propres opinions. Pour parler franc l’orientation systématiquement anti Israël du journal m’irrite souvent , surtout depuis le 7 octobre. Mais cela m’aide à réfléchir contre moi même.

Par contre ce qui me fait réagir aujourd’hui, c’est la soi-disant enquête sur les taupes du KGB en France menée par Jacques Follorou (du 2 au 5 janvier). On a connu ce journaliste mieux inspiré dans le passé. À partir de quelques archives d’un vague transfuge, trouvées à Londres, l’auteur se permet de semer le doute sur la loyauté de nombreuses personnalités qui sont dans l’incapacité de répondre… puisque presque toutes ont disparu. À relire ces articles, je constate qu’à de très rares exceptions, aucune de ces soi-disant révélations ne se fonde sur la moindre preuve.

Seule source : de mystérieuses archives oubliées quelque part à Londres ou un ex agent du KGB fait état de prétendus contacts avec des taupes françaises. Probablement pour se faire valoir auprès de ses supérieurs. Je note également que les mis en cause étaient souvent ministres, diplomates, journalistes, amenés par leurs fonctions à avoir des contacts à l’Est sans être forcément des infiltrés. Aucune enquête sur ces sources. Aucune preuve dans la plupart des cas. Mais beaucoup d’amalgames. Que des personnalités d’inspiration pacifiste aient attiré l’attention des services soviétiques, c’est probable. Que certains d’entre eux aient plaidé pour le désarmement, oui bien sûr. De là à dire qu’ils furent traîtres à leur patrie, il y a un pas. Qu’un journal sérieux ne devrait pas franchir.
.
Je réagis aujourd’hui parce qu’une accusation gratuite en particulier m’a heurté. J’ai connu personnellement Pierre Sudreau. Grand résistant, torturé par la Gestapo, brillant préfet, ministre du Général de Gaulle, républicain au point de résister au Général quand celui-ci fut tenté de ne pas respecter la lettre de la constitution, dévoué maire de Blois pendant des années… Je trouve scandaleux que la réputation d’un homme de cette rectitude puisse être mise en cause aujourd’hui de façon fielleuse, sur la base de on-dit. Ayant, très jeune, travaillé avec Pierre Sudreau, je me sens ici le devoir de défendre sa mémoire.

Je voudrais dire à nos amis du Monde : dans l’époque trouble que nous traversons, un journal dit de référence doit résister à l’envie de racoler le lecteur. Plutôt que de s’engouffrer dans le « tous pourris » (même les morts), il serait mieux inspiré, me semble-t-il, de porter attention aux nombreux influenceurs islamistes, woke ou russophiles qui sévissent actuellement….

Et là, ce ne sont pas les preuves qui manquent.