Droite : ça va saigner !

par Sylvie Pierre-Brossolette |  publié le 18/02/2025

La présidence du parti Les Républicains est l’enjeu d’un duel au couteau entre Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez. Avec en ligne de mire une candidature en 2027.

Laurent Wauquiez, chef de file des députés LR, prononce un discours à Valence, le 13 février 2025. Premier meeting de campagne du candidat à la présidence du parti Les Républicains. (Photo Nicolas Guyonnet / Hans Lucas via AFP)

A première vue, cela ressemble à une énième guerre des chefs, comme la droite en a connu tout au long de son histoire. La dernière, Copé-Fillon, a laissé de très mauvais souvenirs, et chacun s’était bien juré de ne pas revivre pareille bataille fratricide. Et pourtant ! Voici le combat Retailleau-Wauquiez qui promet, malgré les serments de vertu des intéressés, d’être plus saignant que jamais.

Tous les ingrédients sont présents pour une lutte sans merci. D’abord parce que l’objet de la dispute n’est pas seulement le parti mais la candidature à la prochaine présidentielle, que la droite pense avoir enfin une chance de gagner. Celui qui sera battu par les militants à la mi-mai aura du mal à figurer devant les électeurs deux ans plus tard. Laurent Wauquiez s’était un peu vite auto-proclamé « candidat naturel » de sa famille à la compétition suprême. Bruno Retailleau lui conteste cette qualité, mettant en avant des sondages incontestablement flatteurs.

Ensuite, la bagarre risque d’être d’autant plus blessante qu’elle n’aura rien d’idéologique. Le ministre de l’Intérieur et le président du groupe à l’Assemblée sont sur la même ligne politique de « droite décomplexée », ferme sur le régalien, libérale en économie. Ce qui les départagera ne pourra qu’être personnel. Déjà Wauquiez accuse Retailleau de manquer à sa parole (un deal aurait été passé entre les deux hommes pour se partager les rôles) et de se montrer trop gourmand en voulant cumuler fonctions partisanes et ministérielles. L’hôte de Beauvau le renvoie dans ses buts en rappelant que son cadet voulait lui-même son poste au gouvernement…

Enfin, la bataille peut être d’autant plus tendue qu’elle va être longue : RV des courses pas avant les 17 et 18 mai, avec second tour possible la semaine suivante. Les militants admis à voter seront ceux à jour de cotisation le 18 avril. Une ruée sur les adhésions va sans doute se produire, gonflant les scores attendus des duellistes. Aujourd’hui, LR compte un peu plus de quarante mille militants. Ce nombre pourrait doubler. Toutes les méthodes seront bonnes pour attirer les encartés passés ou à venir. Avec autant de contentieux possibles.

Chacun commence à faire le compte de ses appuis dans les fédérations puissantes. Celles de la région Rhône-Alpes, fief de Wauquiez, pourrait lui apporter un soutien conséquent. Mais l’Ile -de-France serait plus favorable à Retailleau. Partout la mobilisation va obliger les « chapeaux à plume » du parti à s’engager. Pour l’instant, l’avantage est au ministre : Gérard Larcher, Xavier Bertrand, Xavier Bellamy se sont déjà prononcés en sa faveur. Même Jean-François Copé, en retrait jusque-là, a décidé de reprendre du service : « Retailleau est le seul capable d’incarner le retour à l’ordre ».

Seule certitude : pour l’heure, Bruno Retailleau est désigné par les sondages comme le favori des sympathisants de droite, Laurent Wauquiez arrivant en queue de peloton. Les militants seront-ils à l’unisson des électeurs? On ne sait pas encore ce qu’ils privilégieront, l’esprit de continuité avec Wauquiez ou l’espoir de gagner avec Retailleau. En attendant, « la droite is back », avec ses délices et poisons…

Sylvie Pierre-Brossolette

Sylvie Pierre-Brossolette

Chroniqueuse