EELV et LFI : la clarification en marche
Tandis que Yannick Jadot essaie désespérément de faire vivre une écologie de conviction, capable de compromis face à l’offensive climatosceptique des nationalistes et d’une partie des droites, le pôle radical et décroissant d’EELV s’organise contre la gauche, en compagnie de LFI.

À Montpellier, Julia Mignacca, est co-secrétaire d’EELV. À Paris, elle est présidente du conseil fédéral, poursuivant son œuvre comme elle le rapporte à nos confrères du Midi Libre : « Je suis revenue sur Montpellier en 2020 (…) Et quand je suis revenue, j’arrive dans un parti qui est fracturé. J’ai travaillé à « cleaner » le parti… ».
Il y a tant à faire pour assainir les eaux fluviales déversées en Méditerranée, appuyer la mise en place de la ZFE dans une partie de la métropole montpelliéraine ou saluer la gratuité des transports pour diminuer l’empreinte carbone. Mais la priorité affichée consiste à nettoyer … son parti. À 13 mois du premier tour des municipales, il s’agit de sceller l’alliance avec les troupes de Mélenchon.
Par-delà des manœuvres internes peu ragoutantes consistant en l’exclusion des oppositionnels, EELV est effectivement fracturée entre les partisans de la rupture et de la décroissance d’un côté et ceux qui se revendiquent encore d’un développement combiné et durable, compatible avec la gauche gouvernementale et la notion de progrès.
Cette fracture a de nombreuses incidences. Elle fait la part belle au localisme, dans une affirmation formellement autogestionnaire et autarcique, défiante par nature à l’égard de toute forme de régulation, étatique ou européenne. Les départements contre la région, la commune au détriment de la métropole, la beauté du terroir magnifiée face à la globalisation démoniaque, voilà qui fait un point commun supplémentaire LFI-compatible.
Ce n’est pas encore la collapsologie, mais des passerelles existent. Reconnaissons une cohérence certaine entre le parcours de Mme Mignacca, depuis son activisme à Notre-Dame-des-Landes et les positions défendues aujourd’hui au sein de sa formation, en adéquation avec Sandrine Rousseau, si ce n’est Marine Tondelier. Alors que la fuite en avant insoumise ne convainc nullement l’opinion, la direction des Verts est en approche pour le rapprochement avec Mélenchon, évitant l’ire du génialissime en cas de législatives anticipées. Les convictions n’empêchent jamais les arrière-pensées d’arrière-boutique. Mais cette approche de l’écologie n’exclut pas d’autres fractures – pas moins déterminantes pour l’avenir.
Faisant allusion à la politique de M. Delafosse, maire de Montpellier, Julia Mignacca évoque « l’instrumentalisation de la laïcité » qui l’aurait « personnellement choquée ». Petite musique parfaitement connue, entonnée sans fausse note par la direction insoumise sur fond de communautarisme désormais démontré.
Madame Mignacca n’est pas de ceux qui se félicitent du prix de la laïcité remise au premier édile de Montpellier ou à Sophia Aram pour leurs prises de position courageuses face au radicalisme religieux qui gangrène les quartiers, fragilise les services publics et mène la vie dure aux jeunes filles. Elle considère que cela relève d’une « instrumentalisation ».
Deux visions de la gauche, deux visions de la société qui ne sont pas sans rappeler la mésaventure de la gauche américaine, minée par les théories en vogue du côté de la rue Saint-Guillaume, conduisant au parallèle infamant entre Kamala Harris et le Néron des Amériques. On connait le résultat. Sans que l’on puisse évoluer à ce jour la proportion des militants EELV partageant cette impasse, elle est probablement majoritaire, renforcée par une reprise en main musclée qui ne dit pas son nom.
Adieu Voynet, adieu Duflot et tant de militants sincères devenus membres d’ONG et de la société civile. Place à l’adoubement mélenchonien, destiné à éconduire les maires socialistes sortants, de manière tout à fait revendiquée.
Face à cette accélération prévisible, déjà annoncée dans nos colonnes, la direction du Parti socialiste poursuit méticuleusement sa paralysie. Les militants et sympathisants sont en quête de l’annonce d’un congrès par le premier secrétaire Olivier Faure, depuis l’automne dernier. Si tout se prépare en coulisse, le commun des militants est toujours sur la touche.
Et encore, pour faire quoi ? Un énième ripolinage donnant priorité au casting ou une refonte programmatique indispensable sonnant le tocsin contre l’offensive populiste ? À tarder, encore et encore, la sentence de Mélenchon consistant à « plumer la volaille socialiste » ne sera effectivement « qu’un jeu d’enfants ».