Goebbels à la Maison-Blanche
L’administration Trump veut imposer aux musées subventionnés la suppression des contenus « inappropriés ». L’URSS de Staline et le IIIème Reich l’ont précédé dans cette voie…

La liberté au pays du « free speech »… Dans une outrecuidante philippique, le vice-président américain J.D. Vance avait reproché aux Européens de limiter la liberté d’expression en voulant réguler le flot continu d’insanités illégales déversées sur les réseaux numériques, racisme, appels à la haine ou diffamation. Dans une incohérence assumée et méprisante, la même administration américaine dont Vance est l’idéologue a décidé de contrôler le contenu des musées américains bénéficiant de subventions publiques, à la manière d’un Goebbels ou d’un Jdanov.
C’est ainsi que les contenus culturels « inappropriés » (Hitler disait « dégénérés », autre mot pour exprimer la même idée) seront dédormais bannis des institutions plus que séculaires comme le Smithsonian Museum, désormais prié de donner de l’histoire américaine une version positive et édifiante. Qu’entend-on en effet par « inapproprié » ? Une attention excessive portée à l’esclavage, à la ségrégation ou au massacre des américains autochtones (ceux qu’on a longtemps appelés « les Indiens »).
Donald Trump estime que ces lieux d’histoire devront dorénavant se fonder sur « la vérité » (en russe : Pravda). C’est-à-dire sur une vérité officielle dont les critères seront fixés par le pouvoir politique et qui s’imposeront par la force d’un décret à toutes ces institutions subventionnées. Désormais, les États-Unis, dans leurs rapports avec la liberté et la vérité, s’inspirent moins de George Washington que de George Orwell.
Les idiots utiles du trumpisme, en France notamment, argueront qu’il s’agit de corriger les excès du « wokisme » qui s’est répandu dans certaines universités et certains secteurs de l’administration. Argument stupide : pour se protéger d’une certaine intolérance – si l’on prend celle-ci comme base du raisonnement – on doit protéger le pluralisme et la libre expression et non imposer par le haut une autre intolérance, étatique celle-là, qui a tous les attributs d’une idéologie officielle comparable à celles qui prévalait dans l’URSS de Staline et Jdanov ou l’Allemagne nazie de Hitler et Goebbels. Seule différence : les contrevenants n’iront pas en prison. On se contente de leur couper les vivres.
Cette censure est d’autant plus idiote que les Américains connaissent déjà les contradictions de leur propre histoire. Ils révèrent en effet ceux qui ont combattu chez eux l’esclavage et la ségrégation, John Brown, Abraham Lincoln, John Brown, John Kennedy ou Martin Luther King. Après une longue période de glorification de la conquête de l’Ouest, Hollywood a décrit par le menu les injustices faites aux premiers habitants du pays, dans des grands films populaires comme La Flèche Brisée, Little Big Man ou Danse Avec les Loups. C’est donc une vaste régression intellectuelle qu’organise l’administration Trump en imposant un récit sulpicien à tous les musées qui reçoivent des fonds publics. Donald Trump se vante de ne pas lire de livres. Quand il entend le mot culture, il sort sa machine à signer des décrets d’interdiction…