Ils ont oublié la planète
Tout à leurs querelles immédiates, les dirigeants français ont de facto abandonné les objectifs de réduction des émissions de carbone fixés par les accords internationaux. Pourtant l’Europe est le continent qui se réchauffe le plus vite…
Ce mardi 22 avril, le monde célébrait la Journée de la Terre, le lendemain de la mort d’un défenseur d’une vision intégrale de l’écologie, le pape François. Or, depuis le début de la guerre en Ukraine, les gouvernements occidentaux ne cachent pas leur désintérêt poli pour le sujet. Alors qu’il s’agit du sujet qui conditionne l’ensemble de l’économie, de l’aménagement du territoire aux transports, en passant par la consommation, on a dû attendre ce vendredi – et plus de trois mois à Matignon – pour que François Bayrou montre un début de réflexion pour le sujet en recevant les associations écologistes. Et sa majorité fragile est sous la coupe de sénateurs LR qui ne cessent de saper les fondements de la politique écologique de l’Etat (ZFE, zéro artificialisation nette, etc.)
L’absence de planification et de réflexion à long terme de la part de l’État mais aussi des industriels (aucun constructeur automobile ne s’est préparé à la fin des voitures thermiques) est patente. Et cette fausse planification a de quoi décourager les meilleures volontés : en l’état actuel des choses, la France aura gagné plus de 4 degrés Celsius en 2100. En 2024, le Gouvernement présenté sa feuille de feuilles en 52 points pour « s’adapter » à ce nouveau climat. Mais il n’y a pas d’adaptation possible. A ce niveau-là, les étés de 45-50 degrés seront réguliers. Il est impossible de faire pousser des cultures maraîchères, des vignes sous ces températures : où en sera l’agriculture française ? À moins de maintenir en vie les élevages dans des bâtiments hautement réfrigérés, les animaux mourront sous l’effet de la chaleur. Qui pour dire qu’il y aura des pertes irrémédiables ?
Il y a un enjeu vital pour les Européens à définit leur priorité et les moyens pour les attendre. L’Union Européenne a longtemps montré des signaux contradictoires : si l’idée protectionniste peut se comprendre, la taxation draconienne des voitures électriques chinoises sans bien de substitution au même prix ne pouvait que freiner la conversion du parc. Alors que le seul intérêt de la Commission européenne depuis le début de l’année est d’orienter les investissements vers les capacités de défense, elle devrait se rappeler une chose : l’Europe est le continent qui se réchauffe le plus vite.
Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale, aucune voix importante ne s’est élevée contre la démagogie ambiante pour proposer un plan de décarbonation ambitieux, juste et populaire. Il faut dire que la victoire du climatosceptique Donald Trump a refroidi plus d’un gouvernement. Selon le dilemme du prisonnier, sur la question du climat, les États-Unis et la Chine ont intérêt à collaborer pour réduire les conséquences du changement climatique. Or, le slogan « drill, baby, drill » du milliardaire républicain ne laisse pas de place au doute : l’Etat fédéral, non content de détruire des données de son agence de protection de l’environnement et de pousser à exil ses chercheurs, va faire comme si rien ne se passait. Cependant, les états démocrates et les grandes villes continueront à appliquer les Accords de Paris. La gauche française doit présenter un plan de résistance à la pulsion de mort de l’extrême-droite qui menace d’emporter le monde un enfer climatique.