La fin du centrisme
Appuyé sur la droite traditionnelle, elle-même louchant vers le RN, le gouvernement Barnier ne pourra plus se situer au centre de l’échiquier politique. Un atout pour la gauche de gouvernement…
Le Foll est un sage. Sollicité par Michel Barnier pour entrer dans son gouvernement, l’ancien ministre de l’Agriculture de François Hollande a refusé de manière courtoise mais nette. L’épisode n’a rien de bouleversant, mais il traduit bien la situation dans laquelle se trouve la gauche aujourd’hui.
Stéphane Le Foll est un opposant interne du PS. Il considère que la direction de son parti a trop concédé à la France insoumise, surtout depuis que celle-ci s’est dédiée non seulement à la radicalité, mais aussi au communautarisme le plus louche, comme vient de le confirmer François Ruffin dans ses tardives confessions.
Pour autant, Le Foll ne compte pas se rallier à un gouvernement qui sera, par nature, orienté clairement à droite. Une telle conjonction, entre la gauche et les autres partis républicains, n’était concevable que sur une base progressiste, où le combat pour plus de justice sociale et une politique écologique responsable étaient placées au premier rang. Tel n’est pas le cas : toutes les personnalités issues de la gauche qui rejoindront l’équipe Barnier, s’il y en a, ne seront que des transfuges banals qui échangeront leurs convictions contre un maroquin.
Dès lors, le jeu politique se clarifie. En lieu et place d’un douteux combat entre « le cercle de la raison » et les extrêmes, qui repose sur la reconduction indéfinie au pouvoir d’un centre attrape-tout, on perçoit le retour d’un clivage démocratique classique mais sain, entre une droite conservatrice mais républicaine et une gauche certes partagée entre radicalité et réformisme, mais qui se pose en candidate au pouvoir.
Cette configuration restaurée est conforme à celle qui prévaut dans la plupart des démocraties et qui offre le choix entre deux options gouvernementales, l’une conservatrice, l’autre progressiste. Dans ces conditions, la gauche n’a d’autre option que de reconquérir ses électeurs perdus, qu’il s’agisse des classes populaires attirées par le national-populisme, ou bien de ces couches moyennes gagnées un temps au macronisme. Toutes choses qui supposent son émancipation des oukases de la radicalité.