La guerre secrète de Zelensky en Syrie
Une information en dit long sur la marche du monde : « les rebelles syriens, écrit le Washington Post, ont reçu l’aide de l’Ukraine pour humilier les russes ».
Venus d’Ukraine, une vingtaine d’opérateurs spécialisés dans les drones sont arrivés voici quatre ou cinq semaines en Syrie. Le quotidien américain relate qu’ils se sont mis à la disposition du groupe rebelle Hayat Tahrir Al Cham, celui-là même qui allait renverser le 8 décembre le Président Assad avec l’appui de la milice pro-turque de l’Armée nationale syrienne.
Environ 150 drones ont été utilisés au cours de leur progression foudroyante vers Damas. Il ne s’agit pas de drones de combat, mais d’engins de petite taille de type « FPV », permettant d’obtenir un retour vidéo de haute définition capté avec l’appareil de façon immersive par le truchement d’un casque de réalité virtuelle. Autant dire un matériel idéal pour observer un adversaire à distance ou faire du guidage pour des manœuvres sur le terrain.
Le rôle de ces drones est resté modeste dans la chute du dictateur Assad. Ce qui compte, c’est le contexte global. Citant une source du service de renseignement militaire ukrainien, le GUR, un journal de Kiev expliquait en juin dernier déjà que les rebelles syriens avaient reçu un appui opérationnel depuis le début de l’année pour frapper les militaires russes. On parle même d’une unité spéciale du GUR, participant directement à des attaques de bunkers en liaison avec la rébellion anti-Assad. L’appui aux rebelles aurait donc connu d’autres épisodes si l’on croit Vassili Nebenzia, l’ambassadeur russe au Conseil de sécurité de l’ONU qui affirmait le 3 décembre que les services ukrainiens ont aidé l’insurrection avec des hommes et du matériel.
Ces opérations clandestines des services secrets ukrainiens ne tombent par hasard. Elles ont commencé à être envisagées en 2023, lorsque les pays occidentaux ont tardé à fournir les missiles de longue portée dont Kiev avait besoin pour frapper en profondeur les positions russes. Pour faire face au grignotage des lignes de front dans le Donbass, l’État-major de Kiev a cherché d’autres moyens pour affaiblir leur adversaire. D’où l’idée de lui infliger des camouflets partout où ils ont des alliés dans le monde.
En Afrique par exemple. Le 27 juillet dernier, un convoi de l’armée malienne, appuyé par un fort contingent de combattants du groupe Wagner est tombé dans une embuscade tendue par les rebelles Touaregs séparatistes. Les faits se sont produits dans la petite localité de Tin Zouatine, sur la frontière entre le Mali et l’Algérie, avec un premier bilan estimé à quelques 130 victimes. Dans une enquête plus récente, le New York Times a révisé ces chiffres à la baisse : 24 soldats maliens tués et 46 mercenaires de Wagner. Quoiqu’il en soit, il s’agit du revers le plus important pour le groupe russe depuis son arrivée au Mali en 2021. A la suite de cette opération, le gouvernement de Bamako dirigé par le général Assimi Goïta avait aussitôt rompu les relations diplomatiques avec l’Ukraine.
Peu après cette embuscade meurtrière, c’est à Kiev, au cours d’une émission de la télévision locale, que l’on découvre le dessous des cartes. Sur le plateau, Andriy Yusov, porte-parole du Service de renseignement ukrainien, explique à demi-mot que des conseillers de Kiev sont sur place dans le nord du Mali pour appuyer les rebelles Touaregs. « Ils ont reçu des informations nécessaires et pas seulement celles qui ont permis de monter cette opération militaire contre les criminels de guerre russes ». Yusov ne donnera guère plus de détail sur l’appui dont les rebelles maliens avaient pu bénéficier à l’époque. Le message était passé. Il confirmait la nouvelle stratégie de Kiev : combattre l’ennemi russe où qu’il se trouve, en Ukraine ou ailleurs.