Le monde inquiet pour la France

par Régis Poulain |  publié le 12/10/2025

La crise inédite qui secoue l’hexagone inquiète la presse du monde entier. Quatre premiers ministres sont tombés en un peu plus d’un an, créant une situation inextricable. Affaiblie, disent les commentateurs, la France manque à l’Europe.

Le Frankfürter Rundschau titre « Macron et son Premier ministre sont devant une tâche herculéenne »

La presse allemande n’est pas tendre avec notre système politique et constate que le manque de culture du compromis empoisonne nos institutions. Le Süddeutsche Zeitung se moque de la France en titrant : « La Grande Nation ne connaît pas la grande coalition ». Pour l’esprit allemand habitué à des alliances de gouvernement à première vue contre nature, « rien n’est plus simple » : il faudrait simplement exclure le RN et LFI de l’équation pour gouverner avec les 383 députés « qui peuvent former et soutenir un gouvernement modéré et pro-européen ». Et le journal de constater que les conditions de vie des ministres français sont sans commune mesures avec le reste du monde, avant de s’interroger benoîtement : « Pourquoi tant de personnes refusent-elles alors cette opportunité de gouverner sous Macron, un homme agréable, politiquement flexible et libéral ? ». La réponse est que pour les socialistes, les Macronistes « sont les fossoyeurs de l’État providence et des fanatiques néolibéraux », et que les conservateurs ne sont pas rassurés par « un président sans une ribambelle d’enfants biologiques, sans chien, qui ne chasse pas ».

Et la décision de reconduire Sébastien Lecornu à Matignon ? Pour le Frankfürter Rundschau, le premier ministre devra s’atteler à « une tâche herculéenne » : trouver un gouvernement, faire adopter un budget, le tout sous l’œil attentif de Bruxelles. « Un budget prévoyant des économies substantielles semble donc nécessaire, mais le Parlement, divisé, ne parvient pas à se mettre d’accord sur la question de savoir si les finances doivent être rééquilibrées par de nouvelles coupes budgétaires ou par de nouvelles taxes, notamment pour les plus riches », peut-on lire dans les colonnes du quotidien.

En Pologne, l’analyse tente de prendre un peu de hauteur. Pour le prestigieux hebdomadaire Polityka, aucun responsable politique français n’est aujourd’hui capable de trouver un compromis, et encore moins de susciter l’adhésion de la population. Or, « l’absence de gouvernement ne fera pas s’effondrer la France, mais il n’y aura ni ordre, ni calme, ni – ce qui est pire – de soutien venant d’elle dans notre Europe menacée ».

Plus à l’Est, le titre russe Gazeta publie une interview du politologue Sergey Fedorov, membre de l’Académie des sciences de Russie. Pour lui, « nommer un quatrième Premier ministre est tout simplement inutile, car cela ne contribue pas à consolider le parlement. Il prévoit que la Chambre basse du Parlement sera probablement dissoute, et que des élections législatives anticipées seront annoncées. » Et de conclure par un commentaire lugubre : « Si la crise dure trop longtemps, tout pourrait se terminer par un effondrement effectif du système politique français ». En un mot, Emmanuel Macron serait bien inspiré de ne pas jouer l’avenir de la France à la roulette russe.

Régis Poulain