Les bobards de Sarkozy
Pour contester sa condamnation, l’ancien président use d’arguments fantaisistes ou bien usés jusqu’à la corde. La justice, elle, n’a fait que son travail.

La décision des magistrats, dit Nicolas Sarkozy, est « une profonde injustice ». Vaste blague… L’ancien président a été condamné successivement par trois instances différentes pour avoir passé un « pacte de corruption » avec Gilbert Azibert et Thierry Herzog en vue d’obtenir illégalement des informations judiciaires (1) ; tous ses recours ont échoué, toutes ses demandes de nullité ont été rejetées et quiconque lit la transcription des écoutes « Bismuth » constate que l’existence du pacte en question est un fait d’évidence, que les magistrats se sont contentés d’observer avant d’en tirer la conséquence logique.
Nicolas Sarkozy clame qu’il n’a rendu aucun service à Azibert, lequel n’a pas obtenu le poste qu’il guignait à Monaco, et donc qu’il n’y a aucun délit. C’est faire semblant d’ignorer la loi. En matière de corruption ou de trafic d’influence, la simple proposition d’échange de services constitue déjà le délit. Règle logique : si un quidam va voir un fonctionnaire pour lui proposer de l’aider illégalement en échange d’une faveur quelconque, la loi stipule qu’il s’agit bien d’un manquement aux règles, passible de sanctions pénales. N’est pas élémentaire ? Comment assurer l’impartialité des agents publics si l’on ne réprime pas ceux qui tentent de les corrompre ?
L’ancien président ajoute qu’il n’a jamais vu Azibert. Argument nul : la loi précise encore que la proposition condamnable peut être directe ou indirecte (à travers un intermédiaire, en l’occurrence l’avocat Herzog, lui aussi condamné). Enfin la défense du prévenu a affirmé que les écoutes pratiquées sur le téléphone portable des protagonistes étaient illégales. La Cour de cassation avait déjà statué sur ce point lors du premier procès et s’était appuyée sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme pour estimer que ces interceptions téléphoniques et leur transcription avaient été décidées à bon droit. Il n’est pas interdit, explique-t-elle, « d’utiliser contre le client d’un avocat les propos échangés entre eux sur une ligne téléphonique placée sur écoute, dès lors que ces propos révèlent des indices de nature à faire présumer la participation de l’avocat à une infraction pénale et qu’ils sont étrangers aux droits de la défense ».
Quant à la fable du « complot judiciaire », elle fait partie de ces fantasmagories rituelles auxquelles recourent tous les hommes politiques pris la main dans le sac, sans qu’ils n’apportent à leurs dires le moindre commencement de preuve. Comment imaginer que les trois cours distinctes de première instance, d’appel et de cassation, composées chacune de plusieurs magistrats, se soient donné le mot pour condamner un innocent, sans qu’aucun d’entre eux n’y trouve à redire ? Nous ne sommes pas dans « House of Cards » mais dans la vraie vie…
En un mot, les juges que Sarkozy cherche à disqualifier ont simplement appliqué la loi, celle-là même que le président de la République est chargé de garantir et de faire respecter. Un devoir qui lui est manifestement étranger…
(1) Voir l’excellent article dans LeJournal.info de Valérie Lecasble en cliquant sur ce lien.