Loi sur la fin de vie : un début difficile

par Sylvie Pierre-Brossolette |  publié le 13/02/2025

La droite est divisée sur la question du suicide assisté. Ceux qui ont des doutes, comme François Bayrou, souhaitent que ne soient pas traités dans le même texte les soins palliatifs et l’aide à mourir. Contre l’avis de nombreuses personnalités de son camp.

Le centre Vignalou : service de gériatrie de l'hôpital François Mitterand de Pau. (Photo de Quentin Top/Hans Lucas via AFP)

L’arbitrage doit être rendu au sommet de l’Etat. On attend la décision d’Emmanuel Macron sur le sort réservé à la nouvelle législation sur la fin de vie. Elle était quasiment prête à être adoptée quand la dissolution a fait tomber le texte en discussion à l’Assemblée : ses partisans demandent qu’elle soit à nouveau mise à l’ordre du jour. Le Premier ministre, que sa foi chrétienne et l’influence de certains conservateurs rendent très réticent sur le suicide assisté, veut scinder le texte en deux, pour séparer les dispositions – et les votes – sur les soins palliatifs et l’aide à mourir.

La ministre chargée du sujet, Catherine Vautrin, n’y est pas allée par quatre chemins pour dire son opposition à cette méthode : « Avec deux textes, ceux qui ne veulent pas de la fin de vie voteront contre. Il y a 162 nouveaux députés, c’est un texte sur lequel il n’y a pas de discipline de groupe, j’ignore quelle sera la sortie. Les pronostics sont incertains ». L’ancienne élue de Reims s’oppose publiquement au Premier ministre, espérant que le chef de l’État, lui-même favorable à un seul texte, fera changer d’avis l’hôte de Matignon.

Quelle que soit la décision qui sortira de l’Élysée, le sujet doit être programmé au Parlement avant la fin de la session ordinaire, fin juin. La pression est forte pour que le projet qui était déjà sur les rails au Palais-Bourbon soit repris et enfin voté. Le « groupe des 184 » (membres de la convention citoyenne sur la fin de vie) réclament que leur avis soit respecté. Cela fait près de deux ans que leur rapport a été remis à Emmanuel Macron…

La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, fait également campagne pour l’inscription à l’ordre du jour de la PPL transpartisane orchestrée par le député Olivier Falorni (ex-PS passé chez les Démocrates). Ce dernier s’impatiente, comme tous ceux qui ont cosigné son texte. François Bayrou promet de consulter les élus mais plaide pour deux textes séparés, affirmant que les soins palliatifs « relèvent du devoir de la société », tandis que l’aide à mourir « soulève une question de conscience ». La manoeuvre ne trompe personne.

« Un seul texte permet de voter sur un ensemble plus complet », explique Catherine Vautrin, consciente que ceux qui nourrissent des doutes sur le suicide assisté s’y rallieront plus facilement s’ils se prononcent en même temps pour le renforcement des soins palliatifs. Cette ancienne LR passé au macronisme admet avoir évolué sur cette délicate question. Elle est maintenant en faveur de l’aide à mourir. Comme une autre personnalité de droite, Alain Juppé, qui vient de confier son cheminement personnel, malgré l’obligation de réserve que lui impose le Conseil Constitutionnel : « Si j’étais parlementaire, je voterais pour la loi sur la fin de vie ».

Les Français sont très majoritairement en faveur de l’aide à mourir. Beaucoup d’élus aussi, à gauche comme à droite. Le Premier ministre les entendra-t-il ou écoutera-t-il d’abord sa conscience ? Un test pour ce catholique très laïc…

Sylvie Pierre-Brossolette

Sylvie Pierre-Brossolette

Chroniqueuse