Macron-Barnier-Le Pen : la nouvelle droite
En choisissant Michel Barnier, Macron opte pour une sous-majorité de droite sous influence lepéniste. Et conforte Faure et Mélenchon à gauche.
Ainsi Macron tombe du coté où il penchait : à droite. Après avoir souverainement écarté Lucie Castets, candidate du NFP, puis Bernard Cazeneuve, option de centre gauche parfaitement jouable, il nomme Michel Barnier, revenant de la droite gaullo-chiraquienne. L’homme est honorable, compétent, rompu aux arcanes européens, où il a officié comme commissaire. Mais enfin : c’est une réincarnation de l’ancienne coalition UMP qui avait soutenu Chirac et Sarkozy. Retour vers le futur…
Outre l’intéressé, il y a deux vainqueurs dans ce médiocre dénouement. Marine Le Pen, en premier lieu. C’est son veto sur Bertrand qui a contraint Emmanuel Macron à choisir Barnier, qu’elle jugeait plus compatible avec la semi-cohabitation qui va s’instaurer entre la coalition gouvernementale et le RN. Sans le nihil obstat de Marine Le Pen, Barnier n’aurait pas été nommé. Comment imaginer qu’il en aille différemment lors des grandes décisions qui attendent le nouveau gouvernement ? Si la gauche dépose une motion de censure – ce qu’elle ne manquera pas de faire à telle ou telle occasion – il suffit au RN de la voter pour faire chuter l’équipe au pouvoir. Voilà qui confère aux nationaux-populistes une influence considérable, alors même que le peuple français s’est clairement prononcé contre le RN par le truchement du Front Républicain ressuscité. Première réussite de Macron.
L’autre vainqueur est Olivier Faure et, par logique de subordination, Jean-Luc Mélenchon, comme le montre, comme l’hab, la réaction immédiate du lider de LFI, usurpant une nouvelle fois le rôle de porte-parole du Front populaire. Architecte d’une gauche minoritaire et sectaire, ce couple à la Dubout a réussi à éliminer toute solution de compromis entre gauche et centre, de manière à empêcher l’émergence d’une force sociale-démocrate, qui leur paraît le danger majeur de la période (pour leurs petits intérêts).
En soutenant Cazeneuve, Faure aurait pu aboutir à une politique plus favorable aux classes populaires et à la transition écologique, même elle ne comblait pas tous les voeux de de la gauche. À ce programme de gauche incomplet, mais réel, tel que Cazeneuve aurait pu le mettre en œuvre, le chef des socialistes préfère de loin un gouvernement de droite, qui laisse au NFP le monopole d’une opposition d’acier et permet à Mélenchon de lancer sa campagne pour la destitution de Macron. Surtout, ne pas gouverner…
Les macronistes ont fait campagne pour éviter Le Pen et Mélenchon, les deux extrêmes. Leur président vient de se mettre dans la dépendance du RN et de faire la courte échelle à LFI pour contrôler la gauche. Reste, malgré tout, à souhaiter bonne chance à Barnier, qui n’est pas un mauvais bougre (de droite), en espérant qu’il ne fasse pas trop de mal à cette pauvre France.