Mais qui a creusé les déficits ?

par Laurent Joffrin |  publié le 18/10/2024

Les chiffres sont implacables : quand la gauche gouverne, les finances s’améliorent, quand la droite est au pouvoir, elles se dégradent. Diable !

Laurent Joffrin - Photo JOEL SAGET / AFP

On connaît l’adage conservateur : « la droite remplit les caisses et la gauche les vide ». Léger problème : sur les trente dernières années, c’est le scénario rigoureusement inverse qui s’est déroulé. Les cigales étaient à droite et les fourmis à gauche.

On a du mal à y croire ? Voici les chiffres de l’INSEE. En 1997, Lionel Jospin trouve le déficit à 3,9% du PIB et le laisse à 3,2% cinq ans plus tard, après l’avoir maintenu trois ans sous les 2%. En 2012, François Hollande hérite d’un trou de 5,2% et le réduit à 3,6% après cinq années de pouvoir. Symétriquement, le même déficit des administrations publiques double sous Sarkozy et sous Macron.

Jospin et Hollande ont-ils pour autant mené une « politique de droite » ? Pas du tout. À chaque fois ils ont laissé derrière eux, au grand dam de la droite, une kyrielle de réformes sociales, petites et grandes. Un seul exemple : on s’indigne au jourd’hui à gauche et dans les milieux syndicaux de la diminution de 4000 postes qui frappe l’Éducation nationale. Qui rappelle que Hollande, avec son ministre Peillon, et conformément à sa promesse de campagne, a accru les effectifs enseignants… de 60 000 postes ?

Rappelons au passage que sous ces deux leaders socialistes, le chômage a diminué (tardivement sous Hollande, ce qui lui a sans doute coûté sa réélection). Ce qui conduit néanmoins la gauche radicale à fustiger, dans les deux cas, une prétendue « trahison » des idéaux de gauche, alors que ces deux sociaux-démocrates ont simplement admis que la France ne pouvait éternellement gonfler la dette publique pour la léguer aux générations futures, tel un héritage infernal.

On dira que Sarkozy, puis Macron, ont dû affronter des crises inattendues, financière pour l’un, sanitaire pour l’autre. Chose incontestable. Mais l’analyse fine des dépenses et des recettes montre aussi que ces deux crises ne sauraient tout expliquer, surtout pour Macron, dont tout le monde aujourd’hui admet qu’il a éteint à coups de milliards des crises qu’il avait lui-même provoquées, comme celle des gilets jaunes, et qu’il a, pour des raisons électorales, fort mal géré la sortie du « quoi qu’il en coûte ».

D’où la commission d’enquête diligentée aujourd’hui par l’Assemblée pour y voir clair dans ce fiasco. Dernière considération, quelque peu sarcastique : cette commission comporte une large majorité de tartuffes. Qui, en effet, dans les rangs de LR qui veut « une vraie droite », du NFP qui rejette « le hollandisme », ou des macronistes godillots du président, s’est érigé ces dernières années en gardien de l’équilibre financier ? Personne ou presque : à chaque secousse sociale, droite et gauche ont surenchéri pour réclamer des dépenses supplémentaires. Les pyromanes se changent aujourd’hui en pompiers, avec à leur tête Éric Coquerel, champion du monde des dépenses nouvelles (150 milliards dans le programme par lui négocié). Tardive sagesse…

Laurent Joffrin