New York : Zohran Mamdani, le populo-progressiste

par Sébastien Lévi |  publié le 22/10/2025

Sauf surprise majeure, Zohran Mamdani devrait être élu Maire de New York en novembre prochain. Son élection serait une onde de choc politique dans tout le pays, et aggraverait la fracture idéologique déjà profonde dont souffrent les États-Unis.

Le candidat démocrate à la mairie de New York, Zohran Mamdani, s'exprime lors d'un débat avec l'indépendant et ancien gouverneur, Andrew Cuomo, et le républicain Curtis Sliwa, à New York, le 16 oct. Les candidats s'affrontent pour leur 1er débat avant l'élection du 4 nov. (Photo Angelina Katsanis / POOL / AFP)

Mamdani est un élu local de 33 ans sans expérience politique significative. Il a surgi au détour de la primaire démocrate pour la mairie de New York en juin dernier. Face à lui, les deux favoris, Éric Adams, le maire sortant, et Andrew Cuomo, l’ancien gouverneur de l’état de New York.

Charismatique, Mamdani a surfé sans peine sur l’impopularité de ses deux rivaux, plombés par différents scandales, de corruption pour Adams et de harcèlement sexuel pour Cuomo. Il a aussi su mobiliser ses partisans autour du thème de la vie chère, auquel les new-yorkais sont particulièrement sensibles. Certaines de ses propositions, comme la gratuité des bus ou la création de supermarchés « collectifs » pour lutter contre la vie chère ont su convaincre largement.

Le thème du pouvoir d’achat résonne à travers tout le pays, auprès de millions d’Américains. Le Parti démocrate, qui a déçu son électorat en délaissant les questions sociales au profit de sujets sociétaux, veut récupérer les classes populaires séduites par le populisme de Donald Trump.

Si Mamdani a su mobiliser les jeunes avec son caractère et ses mesures pour le pouvoir d’achat, il a aussi joué la carte raciale en souhaitant privilégier les « quartiers non blancs ». Mais c’est surtout son positionnement propalestinien qui a joué un rôle majeur : 70% des démocrates de 18 à 49 ans (et 50% des républicains du même âge) ont une mauvaise opinion d’Israël au niveau national, et moins de 10% des jeunes Américains de 18 à 29 ans soutenaient Israël dans la guerre en juin dernier.

Quelque 80% des électeurs du Parti démocrate pensent qu’Israël a commis un génocide à Gaza : le positionnement sur ce conflit devient un élément déterminant pour être élu lors d’une primaire démocrate, au-delà du vote des jeunes. L’antisionisme assumé de Mamdani, éliminatoire en d’autres temps, est devenu un atout en 2025, et ne l’a même pas empêché de séduire entre 30 et 40% des électeurs juifs, en particulier les plus jeunes.

Enfin, la popularité de Mamdani dit autre chose sur l’état de la politique américaine, au-delà même des sujets qui séparent les démocrates des républicains. L’avènement de Trump a affaibli l’idée de compétence et d’expérience au profit de la capacité à porter un message fort et sans nuances. Trump a su capitaliser sur son inexpérience pour se poser en candidat hors système. Mamdani applique la même recette. À bien des égards, il est l’équivalent progressiste de Trump, jouant sur un mélange de dégagisme, de démagogie et de guerre culturelle.

Sans surprise, Trump se réjouit par avance de son élection. Elle serait pour lui l’illustration rêvée de ce qu’il décrit comme le nouveau Parti démocrate : extrémiste, antisémite, woke, incompétent, anti-police etc… Que cette description soit caricaturale ne l’empêchera pas d’y recourir et de faire de Mamdani LE visage du parti démocrate et son opposant principal. C’est donc bien l’avenir de la politique américaine qui se joue dans cette élection municipale.

SEBASTIEN LEVI

Sébastien Lévi

Correspondant aux États-Unis