Olivier Faure, la fin d’une ère

par Boris Enet |  publié le 07/09/2024

À la tête du Parti Socialiste depuis six ans, l’actuel premier secrétaire s’est enferré dans une stratégie qui l’accable. Homme d’un collectif, il est devenu l’otage d’un clan

Boris Enet

Nombreuses sont les voix qui exigent désormais un congrès au sein de la vieille maison. De la maire de Vaulx-en-Velin, Hélène Geoffroy, en passant par le maire de Rouen, Nicolas Mayer Rossignol, les oppositions connues le réclament, encore abasourdies par la dernière séquence de soumission à la stratégie du NFP sous perfusion de Mélenchon. Les grands élus emboîtent le pas, de la maire de Paris en passant par celui de Montpellier ou la présidente de région Occitanie.

Cette dernière accueillera d’ailleurs les siens à Bram comme chaque année dans l’Aude le 28 septembre prochain avec Raphaël Glucksmann comme tête d’affiche. La galaxie sociale-démocrate, longtemps réduite à maugréer, semble enfin prendre la mesure du désastre provoqué par la stratégie du tout ou rien à laquelle s’est rangée complaisamment Olivier Faure.

Laissant les siens se faire huer dans ses propres journées de rentrée à Blois, lourdement silencieux ou à peine critique pour dénoncer les diatribes estivales de LFI sur le Hamas, l’antisémitisme résiduel et autres provocations, le premier secrétaire a perdu le fil d’une stratégie déjà discutable en 2022. Résigné à un programme dispendieux et pas toujours sérieux au regard des contraintes européennes, il a fait de l’unité de la gauche un mythe sans interroger ce qui fait son identité.

Peu consultés, les militants ont même été humiliés par une convention appelée « Retrouvons le peuple », confectionnée par un cabinet de conseil et ressemblant à un grand oral médiocre d’élève de terminale. Entre prendre la porte, rejoindre la convention de Bernard Cazeneuve, se rapprocher de Place Publique ou se lamenter dans leur coin, les sociaux-démocrates désespèrent d’une direction enfermée dans le déni. Déni d’un espace politique qui existe bel et bien pour une social-démocratie europhile comme l’a démontré le succès de la campagne européenne, déni de sondages qui font de la FI le mouvement désormais le plus détesté de France, déni d’une histoire militante et parlementaire qui a produit ses erreurs, mais qui n’a jamais transigé sur le socle des valeurs républicaines depuis le congrès d’Épinay.

Olivier Faure argue fréquemment du bilan de la mandature de François Hollande, à la manière du droit d’inventaire de Lionel Jospin après quatorze ans de mitterrandisme, le talent et la reconnaissance en moins, sans en comprendre le contexte. Mais après un septennat Macron, six ans à la tête du PS, la réalité est cruelle : Olivier Faure a placé la gauche démocratique sous un plafond de verre jamais brisé depuis 2022.

Que l’actuel chef de l’État puisse en jouer dangereusement et de manière irresponsable n’efface en rien la responsabilité du premier socialiste, incapable de réinscrire la gauche au cœur de la société pour en faire autre chose qu’une force de protestation asservie à un stratège populiste. Le chaos politique, démocratique et institutionnel dont nous héritons impose de tourner la page. Il en va de l’existence de la gauche acquise à la République, mais peut-être aussi de la sauvegarde d’une certaine culture démocratique plus que séculaire.

Boris Enet