Para-magistral !

par Laurent Joffrin |  publié le 28/08/2024

Faite de talent, d’émotion et d’intelligence, la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques fut la grande fête de l’égalité dans une France messagère et fraternelle.

Laurent Joffrin

Ils ont bonne mine, depuis hier soir, les procureurs de la « bien-pensance », les contempteurs de « l’égalitarisme », ceux qui se moquent sans cesse de l’attention aux minorités, de la promotion des oubliés, de cette volonté de rendre leur dignité aux affligés de la vie, aux victimes de leur différence, aux irréguliers de la société. C’est-à-dire aux dissidents du genre, aux réprouvés, aux sans-papiers, aux sans toit ou sans emploi, aux discriminés pour leur origine ou pour leur religion ou, en l’occurrence – c’était l’objet de la cérémonie – pour leur handicap. Même préjugés, mêmes injustices.

Émouvante, talentueuse, inventive, à la fois populaire et solennelle, insérée spontanément dans le Paris du rêve et de la Révolution, sur cette place de la Concorde qui fut celle de la guillotine et donc de la guerre civile, mais aussi celle de la réconciliation, l’ouverture de ces Jeux paralympiques a délivré un message politique, au sens noble du terme : la France se veut, décidément, le pays de l’égalité et de la fraternité.

Quelle réhabilitation ! Quelle consécration ! On l’oublie trop souvent, mais les personnes en situation de handicap, depuis les siècles des siècles, ont été l’objet du mépris, de la moquerie, de la commisération de ceux qui s’étaient simplement donné la peine de naître dans ce qu’on appelait « la normalité », c’est-à-dire avec le privilège d’avoir été doté, par la nature ou par la chance, d’un corps et d’un esprit en bon état de marche. Invalide, infirme, aveugle ou paralytique… Les expressions dépréciatives leur étaient réservées et, tout autant, l’idée, délibérément fausse, qu’ils ou elles étaient, par un décret du ciel, des personnes inférieures.

Les Jeux Paralympiques, depuis des décennies, s’échinent à démontrer le contraire, à prouver que le handicap ne limite ni les capacités ni les ambitions et que le mérite, somme toute, est plus grand à surmonter une blessure de la vie, à force de volonté, qu’à faire valoir des capacités naturelles. En raison de la malchance héritée, de l’accident, de la guerre ou de la maladie, le handicap touche quelque 15% de l’humanité. La splendeur de la cérémonie parisienne est un couronnement pour tous ces héros de la résilience, qui ne traînent pas en arrière des valides mais, au contraire, leur montrent le chemin de l’accomplissement. Ainsi, au cœur du Paris des droits de l’Homme, de Danton et de Condorcet, de Gambetta et de son ballon, de Victor Hugo qui fit de Quasimodo une figure tragique et héroïque à la fois, la France, par la magie de l’art et de la ville conjugués, donne au monde une leçon d’égalité et de fraternité.

Laurent Joffrin