Pivot, au secours !

par Bernard Attali |  publié le 23/04/2025

Polar nul, La femme de ménage s’est vendu à plus de quatre millions d’exemplaires. Pourquoi ?

Freida McFadden, « La femme de ménage ». (Photo Riccardo Milani / Hans Lucas via AFP)

Les lecteurs se font rares. On peut le comprendre si l’on en en juge par ce que certains éditeurs osent nous présenter. A priori La femme de ménage de Freida Mc Fadden[1] n’était pas mon premier choix de livre à lire. Mais quand un ouvrage se vend à 4,5 millions d’exemplaires il faut essayer de comprendre le phénomène.

Conclusion : ce roman est à la littérature ce qu’est un manga à Léonard de Vinci. Au début on veut croire à une plongée sociologique dans l’Amérique des inégalités. Même pas : c’est une plongée dans une mauvaise émission de télé-réalité. L’histoire ? Une énigme qui n’occupe pas deux neurones. Le style ? Aussi élégant que le mode d’emploi d’un grille-pain. Les personnages ? Profonds comme des flaques d’eau.

Certains critiques ont parlé de « polar psychologique ». À croire qu’ils ne savent ni ce qu’est un polar ni ce qui est psychologique. Au fil des pages on pense au produit d’une plateforme de type ChatGPT. Et puis non, même pas : l’IA aurait fait beaucoup mieux. Soyons juste : j’ai terminé la lecture. Par plaisir ? Non par curiosité : pour voir jusqu’où peut aller le talent de l’auteur à enfiler des clichés.

Alors la question demeure : des millions de personnes ont acheté ce livre et en ont fait un best-seller mondial. Comment expliquer un tel phénomène ? J’avoue : je n’ai toujours pas trouvé la réponse. Sauf à penser que nombre d’entre eux ont eu le besoin urgent de caler un vieux meuble.

Que cet avis personnel ne soit pas perçu pour méprisant à l’égard de ceux qui ont aimé ce livre ! Il en faut pour tous les goûts. Cela ne m’empêchera pas de regretter le temps où Bernard Pivot guidait nos choix.

[1] City Éditions, Janvier 2023.

Bernard Attali

Editorialiste