PS : Hollande contre Faure
Quelques jours après le Congrès qui a entériné deux lignes divergentes au sein du parti socialiste, l’une de rupture avec LFI et l’autre d’ambiguïté sur fond d’accord électoral, la bataille redémarre entre les partisans de François Hollande et ceux d’Olivier Faure.

La proportionnelle ? Enfin un texte qui aura une majorité à l’Assemblée Nationale ! espère François Bayrou, dont c’est la seule martingale pour durer à Matignon. Au cœur de sa « voie de passage », il fait miroiter aux extrêmes (RN et LFI), la perspective de la proportionnelle début 2026, afin d’esquiver la censure du budget à l’automne. Même si sa tactique aboutissait, la majorité qu’il évoque reste fragile : si les écologistes et le Modem y sont également favorables, le reste du socle commun (Ensemble, Horizons et LR) n’en veut pas. Et les socialistes ? Ils sont, comme toujours, divisés.
Là apparaît, la fracture, plus claire que jamais entre les deux lignes du PS. Pour les uns, la proportionnelle permet davantage de justice électorale et la possibilité de se détacher – enfin – de la férule de La France Insoumise, d’autant que la réforme serait calquée sur celle de François Mitterrand en 1986 – un scrutin proportionnel départemental à un seul tour. Mais au nom de l’union de la gauche, les autres campent sur leur lien local avec la petite gauche et les insoumis dans nombre de circonscriptions pour dénoncer les risques d’une instabilité politique.
La ligne de fracture est donc là, au sein d’un Parti socialiste éclaté en deux camps : celui, dans la lignée des « historiques » Mitterrand ou Jospin et sous la houlette de François Hollande, qui défendent une ligne claire, autonome et responsable de gouvernement ; et celui qui au nom d’une union électorale de la gauche est prête à tous les compromis, y compris avec LFI.
Pour s’en convaincre, il suffit d’évoquer la passe d’armes qui a eu lieu ce week-end entre François Hollande et Olivier Faure.
L’ex-président de la République est monté au créneau le premier, samedi dans le Parisien. « J’ai une position de principe : ne pas ajouter de l’instabilité à l’immobilisme. Je suis donc opposé à toute précipitation du calendrier électoral », pose-t-il en préalable. En clair, pas de dissolution ni d’élection présidentielle anticipée qui ajouteraient du chaos au chaos. Malgré la réélection de son adversaire Olivier Faure comme Premier secrétaire, il n’imagine pas pour autant s’exclure du Parti socialiste dont il est membre depuis 45 ans et qu’il ne quittera pas. Voilà pourquoi, dit-il, « je comprends la démarche du groupe socialiste (auquel il appartient) d’adresser un coup de semonce au gouvernement qui a manqué à son engagement de déposer un texte sur les retraites au lendemain du conclave ». « Donc je voterai la motion de censure », ajoutant « dès lors que le RN ne s’y associera pas », sous-entendu que cette motion de censure n’a aucune chance d’être adoptée. Avant de poursuivre : « pour la suite, je soutiendrai toutes mesures favorables pour la retraite des femmes, l’abaissement de l’âge de départ sans décote et surtout pour la reconnaissance de la pénibilité », ce qui annonce qu’il ne censurerait pas à l’automne un PLFSS qui intègrerait des avancées pour les retraites.
Le lendemain sur LCI, Olivier Faure prend une direction opposée : sous la pression de Boris Vallaud, qui l’a poussé à accélérer le dépôt d’une motion de censure avant même que ne soient vraiment connues les conclusions du conclave, le Premier secrétaire, dénonce une rupture de confiance avec François Bayrou qui les a « trahis ». Le PS n’aura « plus aucune indulgence » à l’égard du Premier ministre, avertit-il et adoptera une position très ferme lors de la discussion du budget 2026. Aux Insoumis, qui lui reprochent depuis des mois d’avoir refusé à six reprises la censure du gouvernement, Olivier Faure rétorque : « nous souhaitons que François Bayrou ne soit plus Premier ministre et qu’il y ait un véritable changement, que nous trouvions un interlocuteur à Matignon », ajoutant : « quand on nous mord la main, il n’y a pas deux fois la même main tendue ».
Malgré le récent Congrès du Parti socialiste qui a tenté le rassemblement, la rupture est donc consommée entre les deux lignes. La première, minoritaire, anti-LFI, est menée de l’intérieur du PS par François Hollande, en l’absence de toute autre incarnation présidentiable au sein de ce courant des opposants : ni Nicolas Mayer-Rossignol, ni Hélène Geoffroy ni Philippe Brun ne peuvent aspirer à l’Élysée. Elle veut s’élargir à ceux pour qui LFI fait figure d’épouvantail : Raphaël Glucksmann (Place Publique), Bernard Cazeneuve (La Convention) et les autres …
En face, le camp majoritaire est reparti à gauche toute, sous la double pression de la nécessité de l’union pour remporter les élections municipales et du poids pris par Boris Vallaud auprès d’Oliver Faure pour durcir vers la gauche la ligne du Parti socialiste.
Entre les deux, la guerre est déclarée. Gageons qu’elle sera totale jusqu’à la présidentielle. À voir d’ici là lequel des candidats s’imposera, entre François Hollande ou Raphaël Glucksmann d’une part, et Olivier Faure voire Boris Vallaud d’autre part.