Quand Hélène et Milton votent Harris
Rien de tel que la création d’un bon vieux vortex pour vous relancer une campagne…
Rationalistes ringards exceptés, chacun l’a compris : de même que l’Haïtien de Springfield goûte civets félins et cuissots canins, les ouragans, conçus dans le secret d’obscurs sérails politiciens, sont aux ordres de mages cravatés dont les ombres hantent les tortueuses entrailles des palais du pouvoir édifiés sur la terre plate.
Ils ne sont rien moins que des phénomènes météorologiques ; ils ne sont pas ce que croient les vassaux de la vieille vérité, invertie, décadente, apatride : ils sont le produit des desseins machiavéliens de suzerains sorciers qui possèdent l’art d’asservir jusqu’aux éléments !
Ce sont deux de ces artefacts climatiques, jadis rêvés par Vinci, Verne ou le Rouge, à en croire l’exquise égérie républicaine Marjorie Taylor Greene, qu’a sous nos yeux lancés contre son peuple la sombre démiurge Harris Kamala, sans doute émule du colonel Olrik de Blake et Mortimer.
Les ouragans Hélène puis Milton, responsables, depuis le 26 septembre, de quelque deux-cents cinquante morts, mille disparitions et trois millions d’évacuations, ne sont en somme que les créatures d’un exécutif aux abois qui va subornant jusqu’à mère Nature, comme Éole les vents ou Neptune les ondes !
Il ne fait aucun doute, aux yeux de l’impavide géorgienne Marjorie, que ses hautes aptitudes analytiques ont conduite jusqu’à la Chambre des représentants où elle interprète la figure de proue du trumpisme le plus radical, que les catastrophes que traverse aujourd’hui la côte ouest des États-Unis soient le fruit d’une réification aussi savante qu’occulte du climat, avatar des manipulations qui générèrent le COVID.
Elle en est si sûre qu’elle voit un « liar » dans quiconque voudrait porter la contradiction à ce qui lui saute aux yeux. « Yes they can control the weather », assure-t-elle sur X, faisant fond sur telle citation tronquée de John Brennan, ex-directeur de la CIA.
Ces venimeux titans que sont Biden et Harris entendent se refaire la cerise, rédimer leur laxisme migratoire et leur aventurisme géopolitique, et par là voler l’élection, en jouant les bons Samaritains au cœur d’un drame conçu en laboratoire, les pyromanes pompiers, en somme…
Nombre de Républicains se sont bien sûr cabrés devant les divagations des ultras trumpistes, tel le représentant républicain de Floride, Gimenez, concerné au premier chef, qui a été jusqu’à interroger la santé mentale de la prophétesse Marjorie. Mais il en va une fois encore des ouragans démocrates comme des croqueurs de canaris de Springfield : ce qu’on en dit, s’il exerce un effet centrifuge sur les esprits voltairiens de telles élites républicaines, est loin de déplaire à la base du GOP et à ses caciques post-modernes. L’ultraconservateur Ron DeSantis, par exemple, gouverneur de Floride, a fait siens les propos ineptes tenus ces derniers jours par Trump, qui préfère, à l’extra-lucidité de sa féale, le confusionnisme. Il se borne en effet pour sa part à accuser le gouvernement d’incurie sécuritaire, d’injustice sociale, attribuant ses manquements à la préférence budgétaire forcenée pour l’étranger, le migrant ou l’Ukrainien, qui lui fait oublier le sort des victimes de la catastrophe…
Joe Biden, à la suite de la Federal emergency management agency, a eu beau réfuter hier les coquecigrues des affabulateurs du GOP et souligner les risques pour le moral des sinistrés de leur délire défaitiste, le mal est fait. Une part substantielle de l’électorat populaire, victime de la misère éducative et culturelle qui frappe le prolétariat américain, semble convertie à la post-vérité servie à louchées par les MAGA.
Elle emprunte, volens nolens – alors que le vote a commencé le 20 septembre en Virginie, dans le Dakota du Sud et le Minnesota et que les résultats semblent très incertains dans au moins sept États-clés, dont certains (Nevada, Arizona…) sont très sensibles à la question de l’abandon social – le chemin qui mène en Barbarie…