Que les démocrates européens se lèvent !
Angela Merkel a réagi après la faute morale et politique de sa formation, cristallisée par un vote honteux en compagnie des députés de l’AfD. Cette réaction est l’occasion de sonner le début d’une reconquête à l’échelle continentale, en défense du droit européen et de la Raison.

En France, une jeune collégienne burkinabé était interpellée le 22 janvier dernier, devant ses camarades, dans l’enceinte de son établissement scolaire. Par-delà l’absurde zèle bureaucratique et les excuses du groupement de gendarmerie de Moselle, cet incident résonne particulièrement dans la période.
Ce jeudi soir, près de 200 personnes ont énergiquement protesté devant la préfecture à Metz, contre ces pratiques incompatibles avec les circulaires ministérielles, fermement rappelées par la ministre de l’éducation, Élisabeth Borne. Les organisations syndicales enseignantes, RESF (Réseau Education Sans Frontière) rappelaient que le règlement européen de Dublin, conduisant à l’étude de l’asile par un seul pays responsable – ici la Belgique – n’autorisaient pas de tels agissements, à l’intérieur comme aux abords d’un établissement scolaire. Par ailleurs, pour l’ensemble des professionnels de l’éducation, la sanctuarisation de l’école comme lieu exclusif du savoir, de la transmission et de la sociabilité exclut par nature de tels procédés.
En Allemagne, les oppositions internes à Friedrich Merz, candidat de la CDU pour la chancellerie, sont minces. Il en résulte un nouvel affaiblissement de la position de Ursula van Der Leyen, pourtant issue des rangs conservateurs.
Présentée comme trop libérale en matière sociétale, ardente défenseure du droit européen, la collaboration conjoncturelle de la droite avec l’AfD, renforce l’influence de Manfred Weber à la tête du PPE (Parti Populaire Européen) de Strasbourg, sur une orientation identique à Retailleau et consorts.
La direction européenne, ou plus exactement ce qu’il en reste, est à nouveau émoussée. Quelles que soient ses insuffisances, Tusk le polonais, Sanchez l’espagnol et Macron même démonétisé dessinent encore un arc progressiste europhile, face à la déferlante nationaliste en cours et ses relais. Et puis faudrait-il compléter ce sombre tableau par les feux croisés de forces issues de la gauche radicale comme Sahra Wagenknecht, partageant un national-populisme compatible avec l’extrême-droite sur la question migratoire ?
Ce constat appelle une réaction vive et organisée de celles et ceux qui, sur la base du rapport Draghi, considèrent que l’Europe est notre solution commune. Cela suppose de franchir un palier, de sortir d’une position strictement défensive, en matière d’investissements, d’intégration politique, économique et industrielle, en hâtant la réunion de ceux qui frappent à la porte.
Raphaël Glucksmann ne dit pas autre chose depuis son ministère de la parole à Strasbourg, au sein du PSE (Parti Socialiste Européen) en prenant la mesure des attaques plurielles de l’empire MAGA.
Laurent Joffrin rappelait qu’il ne suffit pas aux progressistes hexagonaux de pousser des cris d’orfraie, s’offensant du « sentiment de submersion » rapporté du Premier ministre dans un verbatim tronqué et décontextualisé. Pour élaborer une contre-offensive aux succès électoraux de l’extrême-droite en Europe, une réponse renouvelée et adaptée s’impose.
Pourquoi la question des flux migratoires demeure l’apanage des États quand tant de compétences ont été transférées à l’échelle supranationale ? La démographie en berne sur le vieux continent et les menaces géopolitiques à nos portes poussent objectivement à une approche fédérale, rationnelle et humaine.
De nombreuses démocraties décident de quotas, de manière transparente et assumée. La gauche démocratique doit s’en saisir, quitte à ne pas les adopter, mais elle ne peut plus rester dans un silence assourdissant, laissant le champ libre à l’offensive nationaliste. Mayotte en témoigne. Elle doit s’emparer de ce sujet comme des autres pour se présenter comme une force utile, sans démagogie.
En somme, plutôt que de s’enferrer dans des coups de billard tactiques à courte vue, la gauche démocratique devrait prendre la mesure de la menace et sa dynamique pour relever le défi programmatique face aux obsédés de la submersion migratoire, d’un bout à l’autre du continent.
Sans cela, la droite européenne poursuivra sa dérive et le débarquement des forces de l’ordre pour interpeller un élève étranger sera permis et encouragé, sans pouvoir y opposer la loi, des normes administratives, réglementaires ou juridiques.