La sanglante énigme de l’Oural

par Thierry Gandillot |  publié le 14/02/2025

C’est l’un des « cold case » les plus fameux de l’histoire. Personne jusqu’à ce jour n’avait réussi à percer le mystère de la mort de neuf randonneurs dans des conditions particulièrement horribles au fin fond de l’Oural à la fin des années 1950. C’est peut-être chose faite aujourd’hui…

Vue de la tente des neuf randonneurs telle que les sauveteurs l'ont trouvée le 26 février 1959. (Photo prise par les autorités soviétiques au camp de l'incident du col Dyatlov et annexée à l'enquête judiciaire)

Remontons le cours de l’histoire. Le 23 janvier 1959 à 9h05, un groupe de jeunes gens de l’Institut polytechnique de l’Oural part de Sverdlovsk (aujourd’hui Iekaterinbourg) pour une expédition qui doit les mener au sommet de l’Otorten. Ils sont aguerris, sportifs et bien équipés ; l’expédition, difficile mais pas dangereuse, a été bien préparée.

Trois semaines plus tard, leurs proches s’inquiètent de ne pas les voir rentrer. Des secours sont envoyés et les grands moyens déployés : un hélicoptère, un avion Yak-12 survolent les lieux. Sans succès.

Le 27 février, l’équipe de recherche repère leur tente et des traces dans la neige. Peu à peu, on découvre des corps enfouis sous la neige. Ils sont dispersés autour d’un spectaculaire rocher nommé Boot Rock, dans un périmètre de quelques centaines de mètres. Dans des positions étranges voire incongrues. Les vêtements sont éparpillés, déchiquetés. Tous sont nu-pieds. Deux d’entre eux présentent une fracture du crâne. Deux corps retrouvés sous un mètre de neige son enlacés, comme s’ils avaient essayé, dans un dernier sursaut, de se donner de la chaleur.

Les enquêteurs notent que la tente a été lacérée, comme si les jeunes alpinistes avaient voulu s’en extraire, sous le coup de la panique. Le 17 février, des militaires ont noté d’ailleurs observé des « boules de lumière » dans le ciel. La dernière photo prise par le chef de l’expédition montre effectivement d’étranges lumières.

Le KGB ne facilite pas l’enquête et l’enterrement des jeunes gens se fait en catimini. Les alpinistes auraient-ils été surpris par un essai nucléaire ? Au fil des investigations menées par les journalistes, malgré la chape de plomb de la bureaucratie soviétique qui freine des quatre fers, diverses hypothèses voient le jour. Auraient-ils été assassinés par la tribu autochtone qui occupe les lieux pour avoir enfreint un lieu sacré ? Auraient-ils été tués par un yéti ? Auraient-ils été victimes d’extra-terrestres ? Les tests de radioactivité ne montreront aucune anomalie. Au terme d’investigations poussées, l’enquêteur en charge de l’affaire, Lev Ivanov, conclura qu’une « force irrésistible inconnue » a provoqué la mort des randonneurs.

Au fil des années les principaux bureaucrates ayant touché à cette affaire ont été sanctionnés, mutés ou virés. Des milliers de pages ont été écrites sur ce sujet, sans que rien de convaincant n’en sorte. Pendant des années, le producteur et réalisateur américain, Donnie Eichar, s’est passionné par cette affaire. Au point d’aller lui-même par deux fois sur place, bravant les dangers et les intempéries. Il en est revenu avec une réponse – dont on ne dira rien ici, juste qu’elle est aussi surprenante que convaincante. 

« Dead Mountain, Les morts mystérieuses de l’Oural » de Donnie Eichar, Le Cherche-Midi, 330 pages, 22,50 €

Thierry Gandillot

Chroniqueur cinéma culture