Retraite des fonctionnaires : pas touche !
Les discussions prévues entre les partenaires sociaux sur le financement des retraites risquent de buter non seulement sur le diagnostic, mais aussi sur l’approche différenciée entre public et privé.

Qu’est-ce que la mission « flash », menée par la Cour des comptes à la demande de François Bayrou pourrait bien découvrir sur les régimes de retraite qu’on ne connaisse déjà ? Entre les précédents rapports de la Cour, ceux du Conseil d’orientation des retraites (COR), de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), de la Direction des études et recherches au ministère de la santé (DREES), du Sénat et d’autres institutions de la République, on en sait tout de même beaucoup.
Les masses sont énormes : 380 milliards d’euros consacrés aux retraites en 2023 selon le COR, soit 13,4% du produit intérieur et 23,6% de l’ensemble des dépenses publiques. Viennent ensuite les diverses complémentaires : 42 régimes différents, pour les salariés du privé, les fonctionnaires – qu’ils soient d’Etat, territoriaux, hospitaliers ou militaires -, les agriculteurs et professions libérale. Comme le dit la Cour des comptes avec une admirable sagacité : « le système de retraite français est complexe ». Compte tenu de cette diversité des régimes – malgré les rapprochements déjà entrepris entre public et privé – on discute encore de l’ampleur du déficit et de sa nature. Or, sans diagnostic partagé, pas de compromis possible.
La CFDT a déjà prévenu : d’accord pour discuter sur la base d’un déficit de 15 milliards d’euros d’ici à 2030, mais pas de discussion possible en prenant l’hypothèse haute de 45 milliards de déficit, qui englobe le montant du déficit des retraites du secteur public. En clair, pour Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT interviewée sur France Info le 4 février dernier, les discussions sont ouvertes sur le financement des retraites du privé, mais pas sur celles des fonctionnaires.
Car des tabous existent, notamment sur la façon d’appréhender leur régime. Le montant des pensions est établi pour les fonctionnaires sur la moyenne des traitements des six derniers mois (hors primes), alors que le salaire de référence pour les salariés du privé est calculé sur les 25 meilleures années de leur carrière. Le taux de remplacement (montant de la pension par rapport au salaire de référence) est de 75% pour les fonctionnaires contre de 50 à 75% pour les salariés du privé en fonction du salaire de référence.
Mais les avantages apparents consentis aux fonctionnaires découlent du Code général de la fonction publique, qui garantit l’emploi mais procure un niveau de rémunération moins élevé que dans le privé, avec, en compensation, un calcul avantageux de la pension de retraite. Pour changer cela, il faudrait réviser l’ensemble du dispositif du calcul indiciaire sur lequel est bâti le statut des fonctionnaires. Hors sujet, affirme la CFDT, qui attend par ailleurs un « bougé » sur l’âge de départ.
Pourtant, le débat sur les retraites suppose plus de transparence entre les versements de l’Etat en tant qu’employeur, et les dépenses de surcotisations opérées pour les retraites via les budgets des ministères concernés (éducation nationale, santé, défense…). Ce sera peut-être un axe de travail pour la Cour des comptes. Mais de toute évidence, le terrain est miné par des enjeux politiques qui dépassent sa compétence.