Silence, on capitule
Écoutons la petite musique capitularde qui monte au sein de nos élites, en dépit des leçons de l’Histoire.

L’inconséquence de certains hommes politiques est parfois stupéfiante. Quand le Président de la République prend la parole pour alerter le pays sur les dangers de la situation internationale il se trouve un ancien ministre de la Défense pour dire… « qu’il en fait trop », qu’il ne faut pas « dramatiser » ni provoquer Poutine.
Écoutez cette petite musique capitularde qui monte : l’Ukraine est loin, Trump n’a pas totalement tort, personne ne veut mourir pour le Donbass, il ne faut pas humilier Poutine… Décidément nos élites fatiguées ont oublié les leçons du passé.
Comment ne pas voir l’urgence de préparer le pays à une économie de guerre à la hauteur des enjeux ? Il y a trente ans nous dépensions trois pour cent de notre PIB en moyens militaires. Aujourd’hui : deux pour cent. Ce n’est pas être belliciste que de regretter ce désarmement. Et notre naïveté. Un jour viendra où il faudra s’interroger sur la responsabilité de ceux qui nous ont laissés dans une telle dépendance à l’égard des États-Unis. Pour en sortir, la marche est haute, très haute.
Petit retour en arrière. Quand Roosevelt a réalisé qu’il fallait remettre sur pied ce qu’il appelait son « arsenal de la démocratie », qu’a-t-il fait ? Il a réorganisé de fond en comble l’administration américaine à base d’agences-commandos, il a réorienté la production industrielle du pays par un système de quota impératifs, il a porté l’impôt sur le revenu fédéral jusqu’à un taux de 94 pour cent, il a multiplié par 42 les dépenses militaires, il a donné l’ordre à l’industrie automobile de produire des chars , des blindés et des bombardiers (un par jour pour Ford !) au lieu de véhicules civils, il a rationné l’essence, il a limité la vitesse sur route à 55 km heure, etc. etc. Et surtout, il a réussi à convaincre son peuple que la catastrophe n’est pas une question de fatalité mais une question de choix.
Allons, allons, nous dira l’ancien ministre (centriste évidemment) cité plus haut ! Nous n’en sommes pas là, le danger n’est pas le même. Les chars russes ne sont pas à nos frontières. D’ailleurs Trump va se mettre d’accord avec Poutine. Peut-être. Mais à quel prix ? Et après ? Qui arrêtera la Russie, dont on connaît la déloyauté depuis la violation des accords de Budapest et de Minsk ?
Il faut toujours revenir à l’Histoire : si l’opinion outre-Atlantique n’avait pas été préparée par un président courageux, si l’Amérique des années 40 n’avait pas réagi à temps … notre ancien ministre de la Défense chanterait aujourd’hui des hymnes allemands en défilant au pas de l’oie.