The Brutalist : en route vers l’Oscar

par Thierry Gandillot |  publié le 14/02/2025

Sorti en salles ce mercredi 12 février, « The Brutalist », de Brady Corbet est déjà l’un des grands favoris des Oscars. 

Adrien Brody dans "The Brutalist" de Brady Corbet

Film monumental de 3 heures et 34 minutes, « The Brutalist », dix fois nommé aux Oscars, arrive auréolé d’un Lion d’argent reçu à la Mostra de Venise et de trois Golden Globes : meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur acteur pour Adrien Brody (qui a déjà glané une statuette, en 2003, pour son rôle dans « Le Pianiste » de Roman Polanski). L’actrice Felicity Jones qui joue l’épouse de Lázló Toth, le héros du film, architecte tourmenté, et son tourmenteur Guy Pearce qui est aussi son mécène, devraient aussi figurer au palmarès. 

Quoi qu’il en advienne, « The Brutalist », tourné en VistaVision, un procédé de défilement horizontal du 35 mm né dans les années 1950, utilisé notamment par Alfred Hitchcock, King Vidor, Cecil B. DeMille ou Michael Powell, restera dans l’histoire du cinéma.

Cette fresque ambitieuse se déroule entre 1947 et 1980. László Toth, architecte juif reconnu pour son style moderniste inspiré du Bauhaus a fui la Hongrie dans des circonstances dramatiques. Il a été obligé de laisser sur place sa femme et sa nièce dont il n’a pas de nouvelles, ne sachant même pas si elles sont encore vivantes.

Toth est accueilli à Philadelphie par un cousin marchand de meubles design, Attila Miller. Un jour, les deux cousins sont contactés par les enfants d’un nabab local, Harrison Lee Van Buren, qui veulent faire une surprise à leur père : reconstruire la bibliothèque paternelle dans un style moderne.

Le chantier se révélera assez chaotique ; et le nabab, qui ne comprend rien au geste architectural, n’apprécie pas la surprise ; il est furieux. Les cousins ne sont pas payés, ils en sont même de leur poche, après l’effondrement d’une verrière. Et ils finissent par se brouiller quand Attila accuse László de vouloir séduire sa femme.

Désormais à la rue, Toth se retrouve à pelleter du charbon dans une mine. Il ne trouve de soulagement que dans la drogue. L’affaire semble mal embarquée. Mais, entre-temps, Van Buren a changé d’avis à propos de sa bibliothèque. Car l’architecture brutaliste, une mouvance minimaliste, qui privilégie les formes cubiques et le béton dans le sillage de Le Corbusier, est à la mode. Le Tout-Philadelphie s’est extasié devant l’audace du geste et Van Buren apparaît comme un mécène avant-gardiste, ce qui flatte son ego.  

L’industriel millionnaire retrouve Toth dans sa mine de charbon et lui commande un projet pharaonique qui serait tout à la fois un centre culturel, une église, un gymnase, mais aussi un monument à la mémoire de sa mère, à moins qu’il ne soit élevé à la propre gloire de son commanditaire. Dans tous les cas, il s’agit d’épater les élites de Philadelphie.

Van Buren est caractériel, égotiste, mégalomane et doué pour persécuter son entourage. Toth n’est pas commode non plus. D’un caractère entier, sans concession, il est cependant fragilisé par son addiction à la drogue. Quand le chantier s’embourbe à la suite d’un dramatique accident et que les coûts explosent, la fureur de Van Buren s’abat sur l’architecte qui se rebelle. Mais le destin des deux hommes est lié – pour le pire. Le désastre de leur relation culminera dans les carrières de marbre de Carrare dans une scène inoubliable où l’on comprendra le sens profond du titre : le brutalisme n’est pas seulement un geste architectural, c’est aussi une façon d’être au monde.    

« The Brutalist », de Brady Corbet, avec Adrien Brody, Felicity Jones, Guy Pearce, Joe Alwyn, Raffey Cassidy, Stacy Martin et Isaac de Bankolé, 3h34

Thierry Gandillot

Chroniqueur cinéma culture