Toujours Charlie
Le dernier attentat islamiste en date, à la Nouvelle Orléans, provoque à nouveau la désolation. Avec effroi, chacun se remémore l’horreur de Charlie et la promenade des Anglais à Nice. Après 15 nouvelles victimes, la tristesse n’évite pas l’examen de conscience.
À quelques jours de la commémoration des attentats de Charlie, le terrorisme islamiste nous rappelle que le péril totalitaire religieux demeure, sans rien avoir à envier aux monstruosités enfantées par le siècle dernier. Un homme de 42 ans, Shamsud Din-Jabbar, citoyen texan et vétéran, a donc loué une voiture-bélier pour commettre un énième massacre avant de tirer sur des policiers et d’être abattu. En attendant les conclusions de l’enquête, il est établi que son véhicule contenait un drapeau de l’Etat Islamique et que sa radicalisation était récente. Dans le même temps, un véhicule Tesla explosait à Vegas, à proximité d’un hôtel Trump, ajoutant une victime et plusieurs blessés à la séquence terroriste. Plusieurs hypothèses sont plausibles.
La première est l’activation d’une cellule dormante parvenue à réaliser sa sinistre besogne, préparée de longue date. Ce point n’est pas encore établi, notamment sur l’établissement possible de trois complices. Pour les experts, anciens de la DGSI ou de la BRI, la probabilité d’un acte isolé est faible, compte-tenu du degré de sophistication du crime.
La seconde est une mise en garde macabre, politique et opportune, à 18 jours du serment de Trump accédant à la Maison Blanche. Les islamistes ne sont pas seulement des criminels, ils répondent à un agenda et des objectifs politiques – au moins pour les commanditaires. Agissant de la sorte, ils renforcent à dessein l’opposition factice des civilisations, thèse commune à l’extrême droite et aux islamistes.
Trump a déjà réagi sur son réseau social pour réactiver la thèse sordide du grand remplacement local, prolongeant la bêtise raciste. Reste la question qui fâche : l’imprégnation islamiste est idéologiquement répandue dans une partie de la Oumma, la communauté des croyants. Elle permet des passages à l’acte de manière récurrente. Ce constat douloureux et inconfortable est aussi indéniable. Rien ne serait pire que de le taire.
Beaucoup à gauche – comme Olivier Faure – condamnent sincèrement l’attentat terroriste, sans y ajouter d’adjectif. C’est pourtant la caractérisation politique qui donne un sens au nouveau bain de sang de Louisiane. Pas seulement le procédé. Dix ans plus tôt, sous le prétexte problématique « d’islamophobie », une partie de la gauche pas encore wokiste et populiste, décrétait d’autorité l’extériorité stricte de ces actes insoutenables avec l’Islam. Au nom de ce principe, il faudrait donc falsifier une partie de l’Histoire, présentant les huit croisades catholiques, la sainte-inquisition et une multitude d’innombrables crimes commis au nom de l’Église comme une usurpation de cette confession à l’insu de son plein gré ? Une « catholiquophobie » galopante ?
Nous pourrions discuter du caractère dérangé des exécutants des basses œuvres, mais serions interdits d’évoquer l’armement idéologique sous-jacent à de telles exactions, dédouanant une fois encore le projet religieux totalitaire de toute forme de responsabilité. Naturellement, l’écrasante majorité de croyants de confession musulmane ne saurait se confondre avec la récurrence de cette folie morbide. Mais prétendre qu’ils sont tous imperméables à la dérive totalitaire possiblement criminelle est un leurre. Depuis plus d’une décennie, les travaux universitaires et les très nombreuses enquêtes, notamment parmi les jeunes croyants, confirment que l’ordre prétendument divin est supérieur aux règles des sociétés humaines pour nombre d’entre eux.
Si les démocraties sont restées globalement résilientes à l’épreuve des crimes islamistes, la gauche doit caractériser convenablement les attaques. À quelques jours de l’anniversaire de la liquidation de Charb, Cabu et tant d’autres, après les procès réitérés en sorcellerie contre Sophia Aram, c’est l’indispensable condition au retour de sa crédibilité pour s’adresser au plus grand nombre.