Tout ce que Bayrou aurait pu dire sur l’école
Pour tous ceux qui croient encore à l’école et à son rôle majeur pour contribuer à redresser notre pays, la déclaration de politique générale de François Bayrou n’aura pas apporté beaucoup de lumières.
François Bayrou a été enseignant. À juste titre, il s’en flatte. Il a aussi été ministre de l’Éducation nationale. Pendant quatre ans, ce qui n’est pas rien. Mais il est vrai que c’était il y a plus de trente ans. L’école française était encore « la meilleure du monde », expression qui n’a jamais voulu dire grand-chose, mais dont usent – ou plutôt usaient – aisément les hommes politiques. Et voilà que formant son gouvernement, il choisit de mettre au premier rang dans l’ordre protocolaire un ministère regroupant l’éducation nationale, l’enseignement supérieur et la recherche. En somme le ministère de la matière grise de la nation. Il en fait même un ministère d’État et le confie à une ex-Première ministre, une femme peu connaisseuse du domaine, mais énergique, compétente et travailleuse.
Après une telle entrée en matière, on pouvait attendre de sa déclaration de politique générale du 14 janvier 2025, un discours qui donne à l’éducation la place qu’elle mérite dans les politiques publiques pour redresser le pays. Il n’en a malheureusement rien été. Devant une Assemblée Nationale plus dissipée que n’importe quelle classe d’un collège de « quartier », démontrant en cela à quel point l’autorité ne se décrète pas, il a lu une maigre page qui augure mal de ce que Elisabeth Borne devrait faire.
Rien de percutant dans son propos
François Bayrou aurait pu, par exemple, se souvenir de ce que montrent toutes les évaluations nationales et internationales, année après année. Ce qui obère les résultats souvent médiocres de la France, ce n’est pas que nos bons élèves sont moins bons, mais plutôt que de plus en plus d’élèves rencontrent des difficultés d’apprentissage. C’est donc le poids des inégalités entre élèves.
Techniquement cela s’observe à travers la « variance » des résultats des élèves de l’échantillon national, qui est toujours plus grande que dans les autres pays comparables. Forts d’un tel constat, tous les ministres devraient se convaincre que seule la lutte contre les inégalités est le cœur du problème. C’est le sens même de la notion « d’éducation prioritaire » inventée il y a quarante ans et dont il faut plus que jamais diversifier les formes et les moyens.
Avec le dédoublement de certaines classes dans le primaire, on a tenté une piste intéressante, mais qui, par sa rigidité même, a perdu une partie de son efficacité. Ce n’est pas le dédoublement systématique qui est important, mais la souplesse des dispositifs capables de s’adapter à toutes les configurations de classes et de besoins des élèves.
C’est ainsi que dans tant s’écoles, on a effectivement besoin de plus de professeurs que de classes, selon des modalités moins mécaniques que le seul dédoublement. Le coût peut en être jugé élevé, mais c’est le prix à payer pour redonner sens à l’école républicaine.
On peut choisir d’ignorer ces inégalités et d’assumer leurs conséquences. Ou au contraire les combattre, ce qui est le propre de la social-démocratie. L’école française a peut-être besoin d’un « choc des savoirs », mais elle a surtout besoin d’un « choc d’égalité » !