Trump est un salaud

par Laurent Joffrin |  publié le 18/04/2025

Sera-ce l’affaire Dreyfus de l’Amérique ? Trump a fait jeter un innocent dans une geôle salvadorienne et refuse de lever le petit doigt pour le faire libérer. Une saloperie humaine digne des bourreaux du capitaine juif.

Laurent Joffrin - Photo JOEL SAGET / AFP

Imar Abrego Garcia, 29 ans, habitant du Maryland, marié à une Américaine, père de trois enfants, avait fui son pays en 2011 pour échapper aux menaces du gang local qui rackettait sa famille. Interpellé le 12 mars dernier et renvoyé dans son pays d’origine sans aucune base légale, il est enfermé dans une prison réservée aux membres des gangs criminels du Salvador. L’administration Trump a reconnu une « erreur administrative ». Mais elle ne fera rien pour le faire sortir. Au nom de sa politique anti-immigration, elle préfère laisser un innocent en prison plutôt que de donner le sentiment de faire une quelconque concession à « l’invasion migratoire », comme naguère on combattait « l’influence juive ».

Y a-t-il la moindre charge contre ce jeune Salvadorien qui avait trouvé refuge aux États-Unis ? Qu’on en juge. Imar Abrego Garcia a obtenu, peu après son arrivée, un permis de travail dans la construction. Au vu de son dossier, les autorités américaines lui avaient accordé un statut de « non-refoulement » qui interdisait son expulsion. De vagues soupçons policiers l’ont ensuite lié aux activités du gang MS13 actif à New-York. Avec un détail un peu troublant : Garcia n’a jamais résidé à New-York…

Saisie du dossier après son expulsion au Salvador où il croupit en prison, la juge fédérale Paula Xenis a constaté le 4 avril dernier qu’aucune preuve n’avait été produite contre Imar Abrego Garcia et ordonné en conséquence son rapatriement. L’affaire ayant été portée devant la Cour Suprême des États-Unis, les neuf juges, en majorité très conservateurs, ont confirmé à l’unanimité le jugement de Paula Xenis.

En dépit de cette décision des neuf sages, qui l’emporte en principe, selon la tradition américaine, sur celle de l’exécutif, Donald Trump, en accord avec Nayib Bukele, le très répressif président du Salvador, continue à traiter Garcia de « terroriste » et refuse toute action qui lui rendrait justice. Nombre d’élus ont protesté contre cette infamie. Ainsi Chris Murphy, sénateur démocrate du Connecticut : « Abrego Garcia vivait dans ce pays légalement, comme nous tous. Son statut de migrant n’a pas d’importance au regard de la loi. Si Trump peut enfermer ou expulser N’IMPORTE QUI, qu’importe ce que disent les juges, nous sommes tous en grave danger ».

Ainsi va le respect humain le plus élémentaire à l’ère du MAGA triomphant. Au nom de la raison d’État définie par Trump, on condamne un innocent à la prison dans un bagne salvadorien qui n’a rien à envier à celui de l’Île du Diable où était enfermé Dreyfus. Capitaine juif d’un côté, travailleur salvadorien de l’autre. Trump persistera-t-il dans cette cruelle injustice comme l’ont fait ceux qui ont persécuté Dreyfus en toute connaissance de cause ? La démocratie américaine trouvera-t-elle en elle-même les ressources qui avaient conduit la République française à reconnaître son déni de justice ? Dans le pays des « vérités alternatives » où l’on présente un innocent comme terroriste, où l’on accuse les migrants de « manger des chiens et des chats », où la logique identitaire écrase le droit des gens, on doit craindre la même réaction que celle des autorités anti-dreyfusardes à l’époque : « la question ne sera pas posée ».

Laurent Joffrin