Ukraine : la farce meurtrière
La négociation téléphonique entre Trump et Poutine n’est que le énième épisode d’une sinistre comédie où la bêtise de l’Américain n’a d’égale que le cynisme du Russe.
Une fois de plus, la brillante stratégie de Donald Trump en Ukraine a montré sa remarquable efficacité : après deux heures de discussions téléphoniques annoncées à grand renfort de tweets triomphalistes entre le président américain et son homologue russe, les deux interlocuteurs sont arrivés à un résultat clair, net et spectaculaire, qui tient en un seul mot : rien.
Apparemment, l’Ubu de la Maison-Blanche n’a toujours pas compris que le Tsar du Kremlin n’avait d’autre idée que de le mener en bateau en promettant des pourparlers sans jamais fixer de date ni de cadre, de manière à gagner du temps sur le terrain, où il pense avoir l’avantage. Du coup, tels ces enfants qui renversent le jeu parce qu’ils voient qu’ils vont perdre, Trump menace de se désintéresser de toute l’affaire, ce qui n’aura d’autre effet que d’aggraver encore la difficile situation de l’Ukraine.
L’imbécillité diplomatique avait, il est vrai, marqué d’emblée la stratégie trumpiste. Pour régler le problème « en 24 heures », comme il l’avait promis il y a cinq mois, le président américain avait pratiqué ce qu’il faut bien appeler « l’art du non deal ». Plutôt que de chercher à rééquilibrer le rapport de forces de manière à contraindre Poutine à la négociation, il s’est attaqué avec un courage hors du commun au plus faible des deux protagonistes pour que celui-ci accepte de se rendre sans cérémonie.
Pour ce faire, il a concédé à Poutine – qui n’en espérait pas tant, loin de là – les conquêtes territoriales effectuées sur le terrain et la promesse que l’Ukraine ne rejoindrait ni l’OTAN ni l’Union européenne. Voyant cette divine surprise, voyant l’agressé rendu responsable de l’agression par les États-Unis et l’agresseur récompensé pour sa brutalité, Vladimir le terrible a simplement empoché son bénéfice et poursuivi la guerre, dont il pense qu’elle conduira, telle qu’elle est maintenant engagée grâce à Trump, à la chute de Zelensky et à la reddition de son ennemi. Et pour que Trump continue de jouer les benêts de cette farce sanglante, il l’abreuve de bonnes paroles creuses et sans conséquences.
Telle est la mascarade qui se joue sous nos yeux et que les observateurs continuent de commenter gravement, alors qu’elle n’est qu’une sinistre comédie jouée par des guignols cyniques sur le dos du peuple ukrainien. Pour l’instant, seule l’héroïque résistance de l’armée de Zelensky et l’utile mobilisation des Européens se mettent en travers du projet poutino-trumpiste consistant à abandonner l’Ukraine à son triste sort, comme naguère la Tchécoslovaquie. Mais pour combien de temps ?



