France: Un début d’union nationale?

par Valérie Lecasble |  publié le 09/03/2025

Forte du soutien de l’opinion publique, propulsée par le couple Emmanuel Macron à l’Élysée et Sébastien Lecornu à la Défense, la France se place au cœur de la riposte à la défection trumpienne. Avec la bénédiction des partis politiques, sauf le RN et LFI.

Emmanuel Macron et le ministre des Forces armées Sébastien Lecornu, lors d'une visite au Cyber ​​​​Commandement (CATNC) de l'armée française, près de Rennes, le 20 janvier 2025. (Photo Stéphane Mahé / POOL / AFP)

Le choix de Paris pour réunir ce mardi 11 mars les chefs d’état-major des armées européennes, puis le lendemain les principaux ministres de la Défense, ne doit rien au hasard. Seule nation d’Europe à détenir une dissuasion nucléaire autonome – celle des Britanniques dépend de Washington – et forte d’une armée professionnelle de 200 000 hommes, la plus nombreuse d’Europe derrière la Pologne, la France est dirigée par un président qui plaide depuis 7 ans pour l’autonomie stratégique de l’Europe, avec un jeune ministre des Armées qui a acquis en trois ans le respect des militaires. Ces deux-là, enfin, s’entendent comme larrons en foire : plutôt que Bayrou, Macron voulait nommer Lecornu à Matignon.

Le couple tient sa revanche. Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, qu’il nomme l’« imprévisible partenaire américain », le ministre des Armées se retrouve de facto sur le devant de la scène. Ce fin politique l’a vite compris, qui est sorti de sa discrétion sur France Inter puis dans la Tribune Dimanche pour marquer sa trace. Il y fixe le cap : à 32 milliards d’euros en 2017, le budget de la Défense a crû à 50,5 milliards en 2025 pour une trajectoire initiale de 68 milliards en 2030. Mieux, mais insuffisant dit Lecornu qui trace un « horizon autour de 100 milliards par an ».

Les Français valident la stratégie dans un récent sondage Ifop où ils rejettent à 84% une paix en Ukraine négociée sans les Ukrainiens ; souhaitent à 79 % une riposte contre les taxes douanières américaines ; s’inquiètent à 77% que Poutine menace la paix en Europe ; et applaudissent à 76% aux investissements supplémentaires dans la défense à condition toutefois de ne pas augmenter les impôts.

« Quand vous n’êtes pas invité à la table des négociations, c’est que vous êtes au menu (..) nous n’avons pas à être les serpillières sur lesquelles les empires s’essuient les pieds », s’indigne Raphaël Glucksmann avec les mots de celui qui alerte depuis vingt ans sur la menace que fait peser la Russie de Poutine sur les démocraties européennes.
Afin de rallier le monde politique à sa cause, Sébastien Lecornu inaugure jeudi 14 mars un format inédit : en présence de l’état-major des armées et des services de renseignement, il convoque tous les groupes parlementaires sans exception pour les informer confidentiellement de l’état réel des menaces qui pèsent sur la France.

Les prémices d’une union nationale autour des forces armées françaises ? Dans le jargon militaire, cela s’appelle l’esprit de défense. Outre la révision du Service National Universel (SNU), Lecornu insiste sur la nécessité de renforcer le nombre des réservistes toutes compétences confondues, de 45 000 aujourd’hui à au moins 80 000 en 2030.
Pour aller vers une troisième guerre mondiale ? Au contraire, dit Lecornu en substance : « si vis pacem, para bellum » (*).

(*) « Si tu veux la paix, prépare la guerre ».

Valérie Lecasble

Editorialiste politique