Vider Gaza, saison 2 et 3

par Pierre Benoit |  publié le 11/02/2025

En dépit d’un tollé unanime, Donald Trump, secondé par Benyamin Netanyahou, persiste dans sa volonté de déporter deux millions de Palestiniens. Il faut malheureusement le prendre au sérieux.

Le prince héritier Hussein, le roi Abdallah II de Jordanie, Donald Trump et le secrétaire d'État Marco Rubio lors d'une réunion à la Maison Blanche le 11 février 2025. Trump a proposé que les États-Unis deviennent propriétaires de Gaza, transférant des millions de Palestiniens vers les pays voisins. (Photo par Andrew Harnik / Getty Images via AFP)

Décidemment, il a de la suite dans les idées. Pour ceux qui n’auraient pas compris, Trump a répété pour la troisième fois qu’il veut vider Gaza des Palestiniens qui l’habitent pour transformer l’enclave en « côte d’Azur ». Ultime précision : les Gazaouis n’auraient pas le droit de se réinstaller dans l’enclave après la reconstruction opérée par les États-Unis.

Le Président américain n’a prêté aucune attention au tollé suscité par sa première déclaration, au rejet unanime exprimé par le monde arabe, à commencer par l’Égypte et la Jordanie, pressées d’accueillir les Gazaouis, à la grande colère des Palestiniens. Il feint d’ignorer que les déportations de populations sont passibles de crime de guerre, tout en considérant que la Cour pénale internationale a engagé des actions illégales contre l’Amérique et son proche allié Israël.

Donald Trump a imposé à Benyamin Netanyahou la trêve en vigueur avec le Hamas pour qu’elle coïncide avec sa prise de fonction le 20 janvier. Dix-huit otages israéliens ont été libéré et 768 prisonniers palestiniens élargis dans le cadre de cet accord. Il reste encore 76 Israéliens aux mains du Hamas, mais ce dernier considère qu’Israël a violé l’accord et menace de suspendre la trêve. En évoquant le projet de Trump pour Gaza devant la Knesset, Netanyahou a lancé : « le plan du jour d’après, le voici ». Les députés annexionnistes de l’extrême droite exultaient.

Accroché à son projet de reconstruction à l’américaine, porté par un dangereux hubris, Donald Trump menace maintenant les Palestiniens de Gaza des foudres de Jupiter : « libérez tous les otages d’ici samedi, sinon, vous aurez l’enfer ». Parle-t-il pour son propre compte ou celui de son ami Netanyahou ? Peu importe au fond. En engageant sa responsabilité sur l’avenir de Gaza, il vient de replacer Washington dans l’œil du cyclone au Moyen-Orient, alors qu’il voulait se présenter comme un artisan de la paix. Au passage, il prend aussi le risque de voir des alliés potentiels comme l’Arabie Saoudite lui tourner le dos.

Il faut croire Donald Trump, surtout lorsqu’il réitère ses lubies, comme il le fait sur Gaza. Il vit dans une réalité virtuelle, la sienne, un monde où la diplomatie n’existe plus, où le droit international n’est plus qu’une vieille lune, où la mémoire historique est abolie. Mais il dispose de la puissance. D’où son projet : effacer le peuple palestinien de Gaza et de l’histoire tout court.

Pierre Benoit