Violence des jeunes : tous coupables !

par Sylvie Pierre-Brossolette |  publié le 13/06/2025

Le phénomène, mis en lumière par des drames à répétition à l’école, est la conséquence d’un laisser faire auquel il faut mettre fin. En s’attaquant autant aux causes du problème qu’à ses conséquences.

Procès devant la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques de Thomas Rodriguez, jugé pour le meurtre de Rebecca Doerr, une quinquagénaire. Agé de 24 ans, resté silencieux pendant l'audience, est accusé d'avoir violemment agressé la victime le 16 juillet 2021, lui jetant une pierre et lui donnant un coup de pied à la tête. (Photo Quentin Top / Hans Lucas via AFP)

Les chiffres sont là, glaçants : le nombre d’adolescents poursuivis pour assassinat, meurtre, coups mortels ou violence aggravée a presque doublé entre 2017 et 2023, passant de 1207 à 2095. Le nombre de mineurs condamnés pour homicide (42) a atteint son record en 2022. Alors que le chiffre global de la délinquance des mineurs est en baisse de 16% sur la même période, on assiste à un durcissement des comportements déviants les plus agressifs. Le cas de l’élève de 14 ans mis en examen pour meurtre à Nogent, énième manifestation d’un dérèglement manifeste, conduit à une prise de conscience tardive de responsables négligents.

Voilà des années que toutes sortes de rapports et d’éminents spécialistes alertent sur la détérioration de la santé mentale et la montée des violences chez des individus de plus en plus jeunes. Les causes sont nombreuses mais, selon les spécialistes, se concentrent tout de même sur les nouveaux usages du numérique, qui conduisent à l’isolement, à la banalisation de la violence, à la perte de repères, à la confusion entre mondes réels et virtuels, la vie et les écrans.

Écoutons nos experts. Boris Cyrulnik : « Les écrans médusent. On n’apprend plus rien. Ils entrainent un grave trouble du développement neurologique. Le virtuel et le réel se confondent. Il y a désocialisation ». Michaël Stora : « La violence des jeux-vidéos peut être un élément déclencheur des pulsions meurtrières ». Aux États-Unis, dans « Génération anxieuse », un livre majeur devenu instantanément un best-seller, Jonathan Haidt décrit comment, entre poison et drogue, les réseaux sociaux menacent la santé mentale des jeunes qui ne supportent plus la frustration vécue comme un échec.

La série Adolescence, bientôt diffusée dans nos établissements scolaires à la demande d’Elisabeth Borne, montre bien à quel point la société – parents, enseignants, dirigeants – n’a pas pris la mesure de ce qui se passait dans les jeunes cerveaux confrontés à la consommation solitaire des écrans. Qu’il s’agisse des réseaux sociaux ou de jeux-vidéos. Un des plus répandus est GTA (Grand Theft Auto), dont les amateurs attendent avec avidité la sortie l’an prochain de la saison 6. But du jeu : organiser une série de braquages dangereux où le joueur peut commettre toutes sortes de violences. Il est – très théoriquement – interdit aux moins de 18 ans…

Que faire ? On peut difficilement tout interdire. Mais on peut limiter la casse en restreignant au maximum l’accès à l’environnement délétère. Jusqu’ici, la société a regardé ailleurs, se sentant impuissante à réagir, qu’il s’agisse des familles ou des pouvoirs publics. Chacun doit désormais prendre sa part. Les parents doivent mieux contrôler les smart phone de leurs enfants et des mesures doivent être prises pour en diminuer la nuisance. Même si le secteur numérique est compliqué à réguler en raison de son caractère tentaculaire, il faut tout de même le freiner par tous les moyens. On y est bien arrivé pour le contrôle d’âge du porno…

On peut inventer tous les portiques de la terre et supprimer les ventes de couteaux, si on ne soigne pas les causes, on n’arrivera à rien. Combien de morts faudra-t-il encore pour qu’on se réveille ? Il ne suffit pas de dénoncer la « barbarie » sur tous les tons, il faut passer aux actes !

Sylvie Pierre-Brossolette

Sylvie Pierre-Brossolette

Chroniqueuse