Von der Leyen à la hauteur ?

par Boris Enet |  publié le 18/09/2024

Reconduite à la tête de l’exécutif bruxellois, la présidente a désigné sa nouvelle équipe. Pas sûr que celle-ci soit bien armée pour surmonter les épreuves qui l’attendent

La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen (C), assiste à une première réunion avec les commissaires européens désignés à Bruxelles, le 18 septembre 2024. (Photo par OLIVIER HOSLET / POOL / AFP)

On s’est plu en France à épiloguer sur le remplacement de Thierry Breton par Stéphane Séjourné, remplacement fort contestable qui s’apparente à un fait du prince. Mais la nouvelle commission va surtout se heurter à des défis sans précédent, au milieu d’une inquiétude générale. Gagner la guerre aux côtés de Kiev, réorganiser les industries de défense, promouvoir une économie « compétitive, circulaire et décarbonée », favoriser une approche fédérale, voilà ce à quoi doit s’atteler cette nouvelle Commission européenne issue des élections de juin et désormais soumise au vote du Parlement européen.

Le premier est donc celui de la guerre en Ukraine. Il a mis en lumière les atouts des industries de défense des États membres, qui sont parmi les dernier attributs de la souveraineté nationale. Mais elle aussi souligné leur extrême morcellement. Résultat, les sommes désormais considérables investies dans le renforcement des politiques de défense et l’aide à l’Ukraine, leur ont bien moins profité qu’à leurs homologues américaines.

Pour Bruxelles, il s’agit d’engager un vaste chamboule-tout de fusions et d’acquisitions pour inverser la tendance. Avec la nécessité d’y inclure les industries britanniques en dépit du Brexit qui fait de Londres un des points forts d’une future défense européenne intégrée alors que le pays, certes mieux disposé avec les Travaillistes, n’est pas sur le point de revenir à la table commune.

Un Commissaire européen à la Défense a été désigné en la personne du Lituanien Andrius Kubilius. Sa mission recoupe plusieurs grands départements, à commencer par celui de Stéphane Séjourné, vice-président, chargé de la stratégie industrielle. Changement le plus notable dans cette nouvelle direction de l’UE qui renseigne sur l’époque, ses menaces et ses exigences.

Autre représentante des États baltes, en toute première ligne cette fois, l’Estonienne Kaja Callas, prend la tête de la diplomatie européenne et occupera une des six vice-présidences. Très engagée dans le soutien à l’Ukraine, appréciée du Parlement européen dont elle fut membre, elle représente un renfort de poids pour la Commission et devrait défendre une diplomatie plus centrée sur les intérêts européens. Autre femme en première ligne – 40 % de femmes seulement – la Commissaire socialiste espagnole Teresa Ribera, également vice-présidente, prend le portefeuille de la transition écologique. Elle hérite d’un Green Deal, contesté par les agriculteurs, mais indispensable dans sa finalité et ses multiples déclinaisons. Question d’autant plus sensible que les Verts ont de fait rejoint la majorité présidentielle aux côtés du PPE (droite), de Renaissance (centre) et du PSE (socialiste).
Moins consensuelle, la désignation du commissaire italien Raffaele Fitto. Celui-ci obtient un lot de choix, avec une vice-présidence et un portefeuille dédié à la cohésion et aux réformes. Meloni exulte après plusieurs échecs cuisants pour prendre pied à Bruxelles. Encore faut-il que celui-ci ne soit pas recalé par le Parlement lors de son audition. Cela risque d’être le cas par ailleurs du Commissaire hongrois désigné par Victor Orban.

« Prospérité, sécurité et démocratie » affirme la nouvelle présidente en dépit du pouvoir vertical et personnel qu’elle a exercé lors de son précédent mandat. Ursula Von der Leyen annonce des mesures fortes dès les cent premiers jours de son mandat. On aimerait la croire…

Boris Enet