Poutine, l’homme de la nuance

par Laurent Joffrin |  publié le 13/03/2025

Le tsar est prêt au compromis, à condition que ses « nuances » soient prises en compte. Quelles sont-elles ? Des oukases cruels et humiliants.

Laurent Joffrin - Photo JOEL SAGET / AFP

Voilà bien un leader conciliant… Vladimir Poutine est prêt à accepter les propositions américaines – ratifiées le pistolet sur la tempe par les Ukrainiens – qui visent à suspendre pendant un mois la guerre qu’il a déclenchée il y a trois ans. En France, les traîtres associés, pressés d’encenser les ennemis de l’Europe et de la démocratie, chanteront les louanges de ce leader sage et réaliste.

Mais quelles sont les « nuances » dont parle Poutine ? On les connaît depuis des lustres. Il déposera les armes si l’Ukraine accepte d’être amputée de ses régions orientales, si Kiev abandonne toute prétention sur la Crimée et si les Ukrainiens renoncent à toute garantie de sécurité que pourrait lui offrir l’Europe démocratique. En bref, s’ils acceptent, quoique transitoirement souverains, de se transformer en proie offerte à l’ambition russe.

Tel sera, il faut le craindre, le résultat de l’offensive de paix menée par Donald Trump : une reddition humiliante pour le peuple ukrainien. Pour comprendre de quoi il s’agit, il faut imaginer que la France, en butte à une guerre d’usure et pressée par un puissant allié, soit obligée, pour mettre fin aux hostilités, de céder à ses voisins l’Alsace-Lorraine, la Savoie et la Corse, qui furent jadis des terres allemandes ou italiennes. Qu’en diraient les souverainistes qui reprochent à Zelensky de faire obstacle à la paix parce qu’il veut maintenir l’intégrité de son territoire ?

Donald Trump se vante – entre autres rodomontades – de pratiquer à merveille « l’art du deal ». Drôle d’art en vérité… En principe, si l’on veut contraindre deux ennemis à un compromis, il faut équilibrer le rapport des forces entre eux. Comprenant qu’ils risquent un conflit interminable, les deux protagonistes se résolvent alors à des concessions réciproques. Rien de tel avec la vicieuse et imbécile méthode Trump. Pour conclure son « deal », il n’a rien trouvé de mieux que d’affaiblir le plus faible – l’Ukraine – pour amadouer le plus fort, qui se retrouve en position d’imposer son diktat. Ainsi va le monde de Trump, où les plus puissants s’arrangent entre eux pour écraser les plus faibles.

Laurent Joffrin