2/ Wauquiez. Quand l’élite politique massacre l’élite culturelle

par Sandrine Treiner |  publié le 14/05/2023

Juste après avoir supprimé la subvention au Théâtre Nouvelle Génération de Lyon, la région Auvergne  a annoncé de nouvelles coupes drastiques dans le budget de l’historique et formidable festival du Court-Métrage de Clermont-Ferrand

Festival du Court Metrage) à Clermont-Ferrand, -Photo THIERRY ZOCCOLAN / AFP)

Laurent Wauquiez est l’archétype chimiquement pur de cette mauvaise manière française de qualifier les arts et la culture d’élitistes surtout… quand a eu la chance dans les meilleures écoles. Issu d’une famille d’indistriels du Nord, lycéen à Paris, classes préparatoires, élève de l’École normale supérieure, agrégation d’Histoire, major du concours, Sciences Po et l’ENA. Là, on est au cœur des banlieues difficiles, non ?

Allons, ce garçon là méritait au moins une bourse. C’est pourtant le même – excellent élève, intelligent et cultivé – qui décide aujourd’hui de sabrer dans des budgets des organismes dont il a joyeusement bénéficié. Ingrat, va.

Vendredi 13 mai, quelques jours après la suppression de la subvention au Théâtre Nouvelle Génération de Lyon, la commission permanente du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes dédiée aux subventions allouées au monde culturel a annoncé de nouvelles coupes drastiques, notamment la somme de 110 000 euros – presque la moitié de son budget- retirée à l’historique et formidable festival du Court-Métrage de Clermont-Ferrand.

Les différentes tribunes publiées dans Le Monde ou Télérama et regroupant des centaines de personnalités de la culture et huit anciens ministres de la rue de Valois, de droite comme de gauche, n’y ont rien fait. On peut être même certain qu’elles auront renforcé Laurent Wauquiez dans sa détermination. La vice-présidente de région aurait déclaré que laisser les structures vivre sur leurs entrées permettait d’obtenir une… « vérité populaire ». Un magnifique exemple de populisme.

Le discours général des sabreurs de budget est désormais rodé. Il s’agirait de donner « enfin » (sic) la priorité à la France rurale et périurbaine, délaissée des politiques publiques et d’envoyer un signal fort aux populations écartées des centres urbains cadenassés dans leurs privilèges. Loin d’être supprimées, les aides de la région Auvergne-Rhône-Alpes viendraient ainsi renforcer leur soutien à plus de 110 acteurs culturels du territoire. « En Auvergne, ce sont ainsi 36 structures qui vont voir leur subvention être augmentée.

Retrouvons le sens commun ! Il ne se trouvera personne de sérieux en France, notamment à gauche, pour ne pas faire le bilan de l’insuffisance des politiques culturelles en zones rurales.
Pour autant, cela ne se fera pas d’un claquement de doigts, sans temps, ni budgets, ni personnels. Et encore moins en creusant, par un discours simpliste et au fond insultant pour les gens, la sacro-sainte opposition longtemps entretenue en France par les élites elles-mêmes entre le “divertissement culturel” qui serait désiré par le peuple (sous-entendu qui lui suffirait bien), et “la belle culture” réservée aux privilégiés.

C’est même exactement l’inverse. Ce qui fait une société, jusqu’à preuve du contraire, c’est bien le partage d’un socle commun, ouvert, tolérant, universel, d’œuvres classiques comme contemporaines. Laurent Wauquiez le sait parfaitement.
En politique, cela s’appelle du cynisme.

Sandrine Treiner

Editorialiste culture