60 degrés de mauvaise foi

par Laurent Joffrin |  publié le 14/07/2023

Sandrine Rousseau exagère de manière grossière les températures espagnoles. Pas grave : elle accroît encore sa notoriété sur les réseaux. Le crime médiatique paie…

Sandrine Rousseau - Photo Ludovic MARIN / AFP

Il fait donc soixante degrés en Espagne. Les climatologues, les météorologues ont eu beau corriger Sandrine Rousseau, ils ont tous tort : l’élue écologiste a maintenu son premier tweet, selon lequel la température était de 60 degrés dans certaines parties de l’Espagne.

En fait, comme l’ont expliqué ceux qui connaissent un tant soit peu la question, ce chiffre, obtenu par satellite, mesure la température au sol et non celle de l’air. Quand on dit « il fait tant de degrés à tel endroit », on parle de la température de l’air, tandis que celle du sol, par grand soleil, peut la dépasser de dix à vingt degrés. Assez facile à comprendre…

Sauf pour Sandrine Rousseau, qui répond, avec une mauvaise foi punique : il faisait donc bien 60 degrés en Espagne. Tout le monde peut se tromper et la carte satellitaire sur laquelle elle s’appuie pouvait induire en erreur. Mais dès lors que les spécialistes du domaine se sont exprimés, l’éthique minimale du débat démocratique consiste à reconnaître son erreur.

D’autant que cette exagération grossière n’apporte rien : les températures (de l’air) en Espagne ont dépassé les 45 degrés dans plusieurs endroits, chiffre déjà énorme et inquiétant, qui illustre une nouvelle fois la réalité du dérèglement climatique et son accélération récente.

Ce qui appelle une remarque plus générale : comment les médias peuvent-ils encore accorder le moindre crédit à cette élue imperméable à l’évidence factuelle et à la raison la plus élémentaire ? Par l’effet pervers de la notoriété. Sandrine Rousseau a dit un nombre considérable de bêtises, mais comme il y a gagné la célébrité, ses tweets font fureur, son nom est connu de tous, elle est invitée sans cesse à la télévision et à la radio.

En un mot, le crime médiatique paie… Voilà où en est le débat public en France : ceux qui tiennent des propos nuancés et vérifiés sont tenus en lisière, ceux qui alignent les balivernes et les outrances occupent le devant de la scène. Faut-il s’y résigner ?

Laurent Joffrin