Abaya : la funeste connerie va-t-elle prendre fin ?

par Laurent Joffrin |  publié le 07/09/2023

Le Conseil d’État a tranché : le port de l’abaya à l’école tombe sous le coup de la loi. Les procureurs de l’interdiction sont clairement désavoués

Laurent Joffrin

La mascarade du débat sur l’abaya va-t-elle enfin s’arrêter ? En principe, le conseil d’État a sifflé la fin de cette pantalonnade autour d’une robe islamique. Comme toute personne de bon sens pouvait le prévoir, la juridiction a confirmé que l’abaya est bien une tenue « manifestant ostensiblement en milieu scolaire une appartenance religieuse » et donc que la loi de 2004 s’applique sans discussion.

Ainsi la spécieuse campagne lancée contre la mesure par LFI, les Verts et quelques groupes islamistes répertoriés, tourne court. On a un peu honte de lire dans Le Figaro que « la gauche » s’est opposée à l’interdiction de ce voile couvrant tout le corps, quand le PS, le PC et les radicaux, qui comptent tout de même à gauche, et suivant en cela la majorité des électeurs de gauche, y compris ceux de LFI, l’ont approuvée. Toujours cet effet médiatique délétère, qui donne aux plus outranciers le pas sur ceux qui s’évertuent à tenir des positions rationnelles, seraient-ils largement majoritaires…

Depuis la fin du mois de juin, la fraction radicale de la gauche a refusé d’appeler au calme pendant les émeutes, a pris pour emblème le très louche rappeur Médine et a soutenu contre l’évidence que la multiplication des abayas à l’école n’était pas une offensive religieuse. Pour reprendre une expression macronienne déjà consacrée, ce fut l’été des « funestes conneries ». D’autant qu’on s’aperçoit que la campagne par elle orchestrée sur la question laïque a reçu l’aide hautement douteuse de militants islamistes répertoriés, tel le rhéteur présenté comme « un père » dans l’émission toxique de Cyril Hanouna, tels les trolls pro-abaya qui ont squatté les réseaux depuis plusieurs jours et dont on comprend aujourd’hui qu’ils étaient pilotés par des officines turques. Ce faisant, cette fraction radicale a permis à la droite, à l’extrême-droite et aux macroniens de marquer à chaque fois un but contre la gauche. On s’étonnera ensuite de sa faiblesse électorale…

Seule satisfaction, qui désavoue cette fois l’extrême-droite : plus malignes que leurs défenseurs autoproclamés, les familles musulmanes ont fait preuve d’une remarquable retenue, et même d’un sens civique indiscutable. Loin de défier les lois de la République, elles ont, toutes ou presque, choisi de ne plus envoyer à l’école des jeunes filles en abayas. Les chiffres sont éloquents : sur quelque cinq millions d’élèves du second degré, seules 97 jeunes filles ont voulu garder sur elles leur robe islamique pour entrer en classe. Ce nombre epsilonesque mesure le fossé qui sépare les discours alarmistes sur le « séparatisme » des musulmans, de la réalité d’une minorité religieuse qui cherche surtout à vivre en bonne intelligence au sein de la société française et à promouvoir la réussite scolaire de ses enfants, quitte à en rabattre sur ses convictions islamiques.

Le « séparatisme » est certes une réalité. Mais il concerne une fraction activiste ou délinquante – qu’il faut combattre fermement – et non la masse des Français musulmans. 

Laurent Joffrin