Allemagne : ces grimoires qui tuent

par Laurent Perpère |  publié le 05/04/2024

A Bielefeld, près de Dusseldorf, la belle couleur vert émeraude qui décore certains livres s’avère être… un poison violent 

Livres contenant de l'arsenic trouvés en Allemagne.©Federico Gambarini / dpa / picture-alliance / Newscom / MaxPPP

On se souvient de l’enquête de Guillaume de Baskerville, du doigt noirci qui tourne la page du manuscrit, du moine qui tombe raide, foudroyé par sa lecture. Ou plutôt bel et bien empoisonné, car c’est pécher que lire certains manuscrits interdits.

On vient d’apprendre que la malédiction du livre n’est pas qu’invention du génial Umberto Eco: la bibliothèque universitaire de Bielefeld vient de retirer pour examen de dizaines de milliers de livres de ses rayons en raison d’un soupçon de présence d’arsenic, celle de Düsseldorf a fermé temporairement, et d’autres vont suivre.

À partir d’acétate de cuivre et de trioxyde d’arsenic, les chimistes du XIXe avaient créé un beau vert émeraude, le Vert de Paris ou Vert de Schweinfurt, largement utilisé en teinture et, justement, dans l’édition. La couleur tient bien dans le temps, et l’arsenic ne disparaît pas avec lui. Pas plus que ne se détruisent les livres, au contraire des robes ou des gants. Le lecteur d’aujourd’hui, en manipulant le livre, risque un empoisonnement (pas mortel, Dieu merci!), éventualité évidemment inacceptable par les temps précautionneux qui courent.

Il faut se méfier de tout, et pas seulement des poêles traitées au PFAS: on sait depuis longtemps que la lecture est une activité dangereuse…

Laurent Perpère

chronique livre et culture