Anne Frank : une crèche efface son nom
Sur la demande de parents d’élèves, la crèche Anne Frank de la ville de Tangerhütte pourrait changer de nom pour en adopter un… moins politique
C’est le journal allemand Volkstimme qui a rendu publique une histoire qui, à première lecture, paraît si impensable qu’elle ressemble à une mauvaise blague. L’information est pourtant bien réelle.
Interrogé le maire de la ville de cette localité de 10 000 habitants de Saxe-Anhalt, Andreas Brohm, parle de donner à la crèche un nouveau départ. Vers où ?
La directrice de l’établissement, Linda Schichor, plaide la volonté de “trouver une figure plus facile à comprendre tant pour les petits enfants que pour les populations issues de l’immigration”. Décryptage : les parents des familles venues de Turquie ou d’ailleurs n’apprécient pas.
Wolfgang Schneiss, figure du Land en charge de la vie juive et de la lutte contre l’antisémitisme dit “comprendre l’impulsion positive” que veut donner le conseil d’administration de la crèche tout en regrettant la perte de la référence mémorielle à Anne Frank. La crèche portait le nom de la jeune fille assassinée à 15 ans au camp de Bergen-Belsen depuis les années 70.
Allemande et juive, elle s’était cachée avec sa famille pendant deux ans aux Pays-Bas, entre 1942 et 1944, avant d’être victime d’une rafle.
Déjà, en 2021, une école maternelle d’Elxleben, au centre de l’Allemagne, devait être rebaptisée pour adopter le nom de Les Lutins en référence à l’association locale de carnaval. Face au tollé, le maire avait renoncé et s’était excusé.
L’affaire, qui tombe plutôt mal, intervient dans un contexte allemand marqué comme en France, depuis l’attaque terroriste du Hamas, par un regain d’actes antisémites préoccupant. Manifestations pro-palestiniennes tendues, attaques contre des institutions juives à Berlin, tags antisémites, menaces contre des personnalités juives, si les responsables locaux plaident que le processus de changement de nom de la crèche est antérieur à la nouvelle guerre au Proche-Orient, cela ne rend évidemment pas l’initiative plus défendable.
Du reste, le massacre du 7 octobre n’a, à l’évidence, pas donné l’idée au conseil d’administration de la crèche de revenir sur son initiative. Les guerres passent aussi par les symboles.