Après les méga-bassines, la méga-boulette…
Chaque dimanche, un regard engagé sur une semaine d’actualité. Que retenir dans le flot d’informations qui inonde les médias, entre écume des jours et vague de fond ? L’essentiel
Lundi
Après un avis du Conseil d’État sur le pluralisme à la télévision, le grand orchestre de Vincent Bolloré sort le clairon, le tuba et la grosse caisse pour dénoncer la censure. Or il n’a jamais été question de bâillonner qui que ce soit, encore moins de programmer les émissions à la place des programmateurs. Seulement de s’inquiéter du respect de la loi de 1986, où il est écrit noir sur blanc que les chaînes de la TNT doivent partager équitablement le temps de parole entre les différents courants de pensée nationaux. Évidemment, ce débat-là gêne CNews.
Mardi
On s’inquiète à juste titre pour l’Ukraine, usée par la guerre, sur la défensive, où les signes de divisions apparaissent. Rappelons l’origine réelle de cette fatigue de la guerre : le manque de munitions, qui oblige les Ukrainiens à tirer un seul obus quand ils en reçoivent dix. C’est-à-dire les retards irresponsables dans les livraisons promises par les démocraties pour aider les démocrates ukrainiens.
Mercredi
Dans Le Figaro, Alain Finkielkraut se plaint des commentaires qui ont accompagné l’émouvante cérémonie d’hommage à Mélinée et Missak Manouchian. Certains sont anachroniques ou ridicules, c’est certain. Mais il s’est tout de même agi de célébrer un immigré sans papiers mort pour la France, tombé pour la « patrie des droits de l’Homme », fait indiscutable. C’est-à-dire que son exemple, quoi qu’en dise Finkielkraut, plaide indirectement pour l’ouverture et l’accueil des étrangers et contre toute forme de racisme. Message pour aujourd’hui aussi, donc. Il est vrai que Finkielkraut a passé sa vie, si l’on y pense, à critiquer l’antiracisme contemporain, beaucoup plus que le racisme…
Jeudi
Le ministère de l’Éducation annonce que les « incidents graves » ne cessent d’augmenter dans les établissements scolaires. En janvier, fait passé sous silence, on constatait que la moitié des élèves de 15 ans, interrogés dans le cadre de l’enquête Pisa, se plaignaient du bruit qui perturbe les classes. C’est en fait la première réforme de l’enseignement à mettre en œuvre dans l’école de la République : rétablir la tranquillité sans laquelle on ne peut ni éduquer ni instruire.
Vendredi
Par une aberration lunaire, l’Élysée a annoncé que les « Soulèvements de la Terre » seraient conviés à un grand débat au Salon de l’Agriculture, alors même que le gouvernement avait tenté d’obtenir leur dissolution et que personne n’aurait protesté si ces activistes écologistes aux méthodes musclées n’avaient pas été invités. Après les attaques contre les méga-bassines, la méga-boulette… Du coup, le débat en question se ramène à un dialogue viril entre le président et les agriculteurs. Erreur : la crise de l’agriculture ne concerne pas seulement Macron et la FNEA, mais aussi d’autres parties prenantes, écologistes, grande distribution, consommateurs. Il eût été utile de les entendre ensemble, de manière à sortir de l’opposition simpliste entre les paysans en juste colère et les méchants pouvoirs publics…
Samedi
Judith Godrèche a réitéré ses justes accusations contre le milieu du cinéma, coupable d’indifférence ou de complicité envers les comportements des réalisateurs-prédateurs. Applaudissements unanimes et louanges médiatiques. Mais on oublie toujours, dans cette dénonciation des coupables, de rappeler que les remèdes existent, qu’ils ont été formulés depuis un certain temps par des associations comme le « collectif 50/50 » et qu’il est peut-être temps, plutôt que de s’enfermer dans une vaste opération d’épuration rétrospective, de les mettre en œuvre.