Avec Glucksmann, sans Mélenchon !

par Boris Enet |  publié le 18/03/2025

Le congrès de Place Publique indique la voie. À gauche, avec la gauche, à l’exception de ceux qui l’ont caricaturée, quittée et salie depuis plusieurs années. Exit LFI, à l’unisson d’un large spectre de l’électorat.

Raphaël Glucksmann à Paris, le 16 mars 2025, lors du congrès de Place Publique. (Photo de Daniel Perron / Hans Lucas via AFP)

L’appel du 16 mars restera comme un moment clé du retour possible de la gauche au premier plan. Un printemps qui pose des principes et jette des ponts pour demain. Il clarifie surtout à haute et intelligible voix ce que beaucoup pensaient, sans jamais le verbaliser par lâchetés ou calculs boutiquiers : la direction insoumise a quitté la gauche.

C’est l’orientation actée par le leader de Place Publique, rapportée par Valérie Lecasble dans nos colonnes. Non qu’il s’agisse d’une vexation des lendemains de la dernière législative pour aboutir à un programme sous tutelle, mais une évidence principielle qui s’impose à tous. Le temps est venu de définitivement tourner la page des compromissions avec un courant populiste et antidémocratique, souverainiste et anti européen affichant désormais un profil antisémite, formellement démenti, mais toujours répété.

Complaisant avec le criminel de guerre Poutine, brutalisant le débat public, la dignité des adversaires comme des partenaires, « bordellisant » les institutions jusqu’à la promotion du RN, le mouvement LFI est bien issu de la gauche, mais s’en est extrait seul, dans le fond comme sur la forme.

Au PS, Nicolas Mayer Rossignol et ses soutiens ne disent pas autre chose et rejoignent ce souhait d’une plate-forme commune avec les amis de Glucksmann, parce que l’horizon le commande, tout comme la situation internationale déclinée au plan hexagonal. L’électorat de la gauche l’adoube majoritairement dans tous les sondages. Que cela soit sur le budget et le refus du chaos, sur la solidarité européenne ou la défense commune, les enjeux polarisent à nouveau l’électorat sur de nouvelles lignes de force et marginalisent Melenchonov et les siens.

Même le carcan LFI structuré autour de la figure du chef se lézarde. Dans le Maine et Loire, une trentaine d’animateurs de la nébuleuse, quittent le bateau ivre, verrouillé localement par le POI (Parti Ouvrier Internationaliste), dernière queue de comète du lambertisme ou plutôt de ce qu’il en reste. Mieux vaut s’en extraire avant « la purge » pour reprendre le vocable de ces militants de la première heure. À Villeneuve-Saint-Georges, Louis Boyard, à peine élu conseiller municipal assiste impuissant au départ de cinq de ses colistiers, préférant constituer un groupe d’opposition indépendant de sa tutelle. La gauche démocratique et républicaine tient l’occasion de se défaire de cette emprise, confirmant le diagnostic posé par Place Publique.

Dès lors, on comprendrait mal comment ce qui est annoncé à l’échelle nationale par l’organisation de Glucksmann et Lalucq ne vaudrait pas à l’échelon municipal. Les socialistes et la gauche ne peuvent envisager des listes communes au premier tour des municipales avec les Insoumis comme la possibilité de fusions de listes au second, a fortiori dans des exécutifs locaux, à moins d’accepter l’éclatement de majorités municipales, à peine élues, et un inintelligible message que la gauche a déjà lourdement payé. Celles et ceux qui s’y sont essayés, paient le prix fort devant les attaques répétées, parfois diffamatoires de cette fable populiste obnubilée par la défaite de son camp et ses réalisations locales.

La puissance du retournement international à l’œuvre comme la propre dérive de LFI, marginalisent le leader minimo à large échelle. De la même manière que le Néron des Amériques a permis bien malgré lui la réunion des Européens incluant les Britanniques, des Canadiens et des Mexicains, le Brutus de la gauche conduit malgré lui à la redéfinition d’une gauche pluraliste, démocratique, europhile et universaliste.

Raphaël Glucksmann a ouvert le bal. La gauche, à commencer par les socialistes, doit saisir la main tendue. Un motif supplémentaire d’écarter ceux qui ont prôné et pratiqué la compromission honteuse avec Mélenchon. Ils sont à nouveau minoritaires dans l’électorat de gauche mais ne sauraient bénéficier d’amnistie pour des raisons autant politiques que morales. Cela vaut pour l’actuelle direction Faure au PS comme pour celle de Tondelier à EELV.

Boris Enet