Ciottise

par Laurent Joffrin |  publié le 12/06/2024

Les scènes burlesques qui ont eu lieu hier autour du siège de LR font rire les adversaires de la droite. Elles ne sont pas forcément réjouissantes.

Laurent Joffrin

Le forcené de la place du Palais Bourbon a fini par quitter les lieux. Qualifié de traître et de collabo, exclu du parti, traqué par le trio FFI Pécresse-Larcher-Copé, Éric Ciotti a réussi à s’échapper. « En 1940, a dit un de ses camarades, il n’aurait certainement pas traversé la Manche. » Pour l’instant, il a disparu, peut-être du côté de Vichy. Il a une chance dans son malheur : grâce à son style capillaire, il sera difficile à tondre à la Libération.

Trêve de plaisanterie. La pantalonnade à laquelle se sont livrés hier les dirigeants du parti LR, avec un président enfermé à clé dans son bureau et une direction contrainte de se réunir dans un musée (symbole prémonitoire ?), est à la fois comique et peu réjouissante. Certes, la réaction énergique des principaux responsables de la droite classique a quelque chose de réconfortant. Si Les Républicains, quoique d’une droite très affirmée, tiennent encore un peu à la République, tout n’est pas perdu.

Déséquilibre

Mais l’explosion en vol de la formation héritière – lointaine – du Général de Gaulle et de Jacques Chirac, éparpillée façon puzzle entre le RN, la macronie et une étique indépendance, déséquilibre encore plus le paysage politique. On vivait naguère dans une confrontation plutôt saine entre droite et gauche. La disparition de LR, qui n’est plus invraisemblable, réduit le jeu politique à trois forces : l’extrême-droite renforcée de quelques défecteurs LR ; un centrisme désormais en chute libre, sans assise populaire ni colonne vertébrale ; une gauche encore trop dépendante de LFI, même si la campagne Glucksmann a permis d’entamer un rééquilibrage.

Un trio asymétrique qui oppose au RN en pleine ascension un macronisme friable et une gauche ambiguë. Alors que l’existence d’une droite classique permettait au moins de fixer dans les limites républicaines un électorat conservateur droitier mais solide, désormais attiré vers la xénophobie comme par un aimant. Le macronisme prétendait proposer une synthèse politique qui emprunte à la droite et à la gauche leurs meilleures idées. Il les a surtout poussées à se racornir dans le dogme, l’agressivité et l’outrance.

Laurent Joffrin