Contre la guerre, la planque des bunkers ? 

par Boris Enet |  publié le 27/11/2024

Calin Georgescu, en tête lors du premier tour de l’élection présidentielle en Roumanie, n’est que le dernier avatar de cette galaxie de Poutiniens portés par la vague trumpiste et la peur de la guerre. Vents mauvais sur notre Europe. 

Le candidat roumain d'extrême-droite, pro-russe, Calin Georgescu le 26 novembre 2024, à Bucharest. (Photo de Andrei Pungovschi / Getty Images via AFP)

Le coup est rudement ressenti à Bucarest. Quelque dix-neuf millions de Roumains sur la voie d’une pleine intégration dans l’Union, se retrouvent devant un choix existentiel. La démocratie et l’Europe d’une part, les régressions et la dépendance à l’ogre russe de l’autre. Ils devront trancher lors des législatives et du second tour de la présidentielle. Rien n’est perdu, mais avec un tiers de l’électorat se portant sur l’extrême-droite classique et les nouveaux Poutiniens, l’alerte est chaude.

Une peur irrationnelle frappe également l’Europe au cœur. En Allemagne, à l’avant-veille des élections du 23 février, on recense bunkers et autres abris à la manière de l’armée française d’antan qui préconisait, pour faire face aux attaques nucléaires, biologiques et chimiques de se réfugier sous les tables. 

L’ex, Mutti Merkel, descend de son piédestal pour justifier ses renoncements au nom de la paix. Le SPD, pour promouvoir son candidat, vante « son sang-froid ». Scholz n’a-t-il pas téléphoné à Poutine ? Désarroi de l’opinion dans une partie de l’Europe centrale et orientale qui prend racine dans une forme de désenchantement combinée à une angoisse devant « la guerre qui vient ». Désenchantement car les inégalités, auraient-elles été partiellement comblées, demeurent. 

Ceux qui ont souvent rejoint la Maison commune avec enthousiasme, en dressent le constat amer, pourtant trompeur. N’était-ce pas mieux avant, quand « le grand frère » veillait sur tout ? Un état d’esprit d’autant plus dommageable qu’il affecte davantage les jeunes qui n’ont pas connu l’emprise de l’ours blanc. 

Certes, l’Europe des 27 possède ses travers, comme le souligne la formation de la nouvelle Commission. Les droites du PPE ont imposé à la coalition majoritaire – contre les Socialistes et Renaissance – un proche de Meloni, au nombre des cinq Vice-présidents exécutifs. 

Probablement sans conséquences pour Kyiv, mais le coup est sévère, au moment où l’UE est dans la ligne de mire de Trump et de ses serial Killers. Mexicains et Canadiens font déjà les frais douaniers du Phare de Mar-a-Lago, avec une probable nouvelle poussée inflationniste à la clé. 

Francfort a le choix. La BCE peut prendre le contre-pied en abaissant de 0,5 point de base ses principaux taux directeurs dès le 12 décembre en soutien à nos économies ou ne rien faire ou presque – une baisse de 0,25 point. Un premier signe de résistance ou d’abandon.

Sur le front militaire, l’Ukraine est épuisée, mais la Russie l’est tout autant. Faute de ne pas toujours avoir été au rendez-vous en temps et en heure, l’UE et son allié Britannique sont devant un choix qui décidera de l’avenir du monde d’après. Céder au couple Trump-Poutine, ne pas « mourir pour Kyiv » selon la terminologie melenchono-lepeniste, dans l’attente des prochaines victimes d’un ordre bipolaire aussi sinistre que factice. Ou se battre et mobiliser sans trembler. 

Ils en ont les moyens, il le faudrait.

Boris Enet