COP 28, l’Afrique reste sur sa faim
Les voix des États africains ont eu du mal à se faire entendre à Dubaï. D’autant qu’elles ne s’expriment pas forcément à l’unisson des Occidentaux…
Derrière l’ovation ayant salué le coup de marteau final du président de la COP 28, se cachent bien des frustrations. Le courroux des Africains n’est pas le moindre. Et il concerne presque tous les points importants.
À propos des combustibles fossiles, il serait trop facile de considérer que ces pays se réjouissent de cette « transition s’éloignant des fossiles » telle que la promet l’accord. Car, en Afrique subsaharienne, s’il y a de jeunes activistes écologistes telle l’Ougandaise Vanessa Nakate, désormais plus célèbre que Greta Thunberg, on trouve aussi des pays producteurs de gaz et de pétrole. D’abord d’anciens membres de l’OPEP comme le Nigéria, le Gabon, l’Angola, le Congo-Brazzaville et la Guinée-Équatoriale auxquels s’ajoutent des nouveaux qui veulent profiter de cette manne pour s’assurer un développement plus autonome. Le Niger, le Sénégal ou la RDC sont sur les rangs.
Une attitude justifiée par les besoins du continent, notamment en électricité. Le président ougandais Museveni faisait d’ailleurs observer que cela ne ferait accroitre qu’à la marge la part des émissions de gaz à effet de serre de l’Afrique subsaharienne. Son pays est ,certes, intéressé directement par le grand projet Tilenga de TotalEnergies, pour autant l’argument ne peut être balayé d’un revers de main.
L’Afrique ne peut donc pas renoncer a priori à une production massive d’électricité. Pas plus que les pays occidentaux dont de nombreux observateurs africains notent l’« hypocrisie », qui consiste à recourir au charbon ou aux hydrocarbures si nécessaire, ou pour éviter le nucléaire.
L’Afrique s’est montrée néanmoins prête à développer fortement les énergies renouvelables comme en témoigne la conférence de Nairobi tenue en septembre. La résolution finale envisageait même plus qu’un quintuplement, d’ici 2050 , de 56 gigawatts à 300. Une progression bien au-delà de l’accord de Dubaï. La disponibilité d’une production d’électricité de base à partir des seules énergies renouvelables ne parait pour autant pas garantie. Elle doit reposer aussi soit sur le nucléaire, soit les énergies fossiles. Le sous-sol africain possède les ressources nécessaires.
Mais la frustration la plus forte vient évidemment des fonds promis pour la transition énergétique. Ainsi le montant de 200 milliards de dollars par an promis depuis 2020 par les pays développés n’aurait été atteint qu’en 2023. Et les observateurs les plus attentifs ont bien du mal à distinguer ce qui relève vraiment de ce Fonds. Ces pays font en outre face à des taux d’intérêt et des endettements de plus en plus importants qui pourraient mettre en péril leurs projets de transition énergétique.
Il en est de même pour le Fonds « pertes et dommages ». Les dotations annoncées sont très en deçà des besoins estimés. L’Afrique reste donc sur sa faim. Au propre comme au figuré. Derrière l’absence de développement, la pauvreté progresse. Et donc la faim.