Crise de régime
Et si ce que nous vivons n’était pas uniquement une crise politique, mais, plus fondamentalement, une crise des institutions ? Par François Miquet-Marty (*)
La dissolution est née d’une impuissance : l’ingouvernabilité parlementaire et le caractère devenu potentiellement inopérant des « 49-3 » ; le gouvernement engageant sa responsabilité sur un texte, la censure du gouvernement devenait de plus en plus envisageable. Le risque s’annonçait réel pour la majorité présidentielle en vue de l’adoption du budget 2025.
Le 7 juillet, au soir des nouvelles législatives, ce blocage sera-t-il levé ? Imaginons à l’Assemblée une majorité relative autour du RN, du Front populaire ou de Renaissance : les minorités s’abstiendraient-elles de voter la censure ? L’Assemblée demeurerait ingouvernable, les gouvernements impuissants. Ces hypothèses ne sont pas fortuites : elles sont le fruit des nouveaux clivages (tripartition), et des incompatibilités entre les différentes sensibilités.
Cette « nouvelle donne » signerait la fin du parlementarisme rationalisé, qui était au cœur de la Cinquième République depuis 1958. En dépit de toutes les critiques, le « 49-3 » parmi d’autres avait permis jusqu’ici au régime actuel une stabilité dont les Républiques précédentes auraient rêvé. Multiplier les élections législatives risque hélas de ne pas résoudre le problème : prévaut un risque non négligeable que les ingouvernabilités se succèdent, parce que la société et les institutions ne parlent plus le même langage.
Éviter cette crise de régime imposerait, mieux que des accords d’appareils, une véritable dynamique de société en faveur de l’une des sensibilités et autorisant, au moins cette fois, une majorité absolue. Gageure ou belle ambition démocratique… Une autre hypothèse, terre encore plus inconnue, serait un changement de régime… Sur ce registre institutionnel aussi, le navire risque de tanguer.
(*) Président du Groupe Les Temps Nouveaux