Crise du Logement: ces Français qui risquent de se retrouver à la rue

par Valérie Lecasble |  publié le 30/04/2023

Des taux d’emprunt approchant désormais les 3 % , l’interdiction d’un  endettement supérieur à 35 % de ses revenus,  des banquiers frileux et des prix qui ne baissent pas…un vent de panique souffle sur l’immobilier

France, Pays Basque, Bayonne, manifestations contre la crise du logement-Photo Sarah Witt / Hans Lucas

« Si vous voulez vendre votre maison, n’acceptez aucune clause suspensive liée à l’obtention d’un crédit immobilier. Trois acquéreurs potentiels sur quatre ne pourront pas l’honorer ».
Cet agent immobilier, grand spécialiste de la côte Atlantique , formel : la période post-Covid où la moindre maison pas trop éloignée de la mer pouvait être cédée au prix fort en quelques semaines est révolue. Avec des taux d’emprunt approchant désormais les 3 % et une législation empêchant tout endettement d’un ménage supérieur à 35 % de ses revenus, la possibilité pour les Français de devenir propriétaire s’est largement contractée.

D’autant que les prix n’ont pas encore baissé. Ou pas vraiment. L’envie de prendre l’air du large a poussé depuis trois ans les Français à quitter les grandes métropoles pour s’installer dans des villes moyennes ou en province, la recherche d’une qualité de vie plus paisible et l’essor du télétravail ont fait flamber l’immobilier.

Comme si le marché n’avait pas encore pris vraiment conscience des risques liés à la hausse des taux d’intérêt et à la limitation de la capacité des ménages à s’endetter.

A Paris, c’est le pompon. Selon la récente étude de la start-up Virgil, spécialiste de l’immobilier, il faut désormais gagner près de 100 000 euros par an, soit 6500 euros netspar mois, deux fois plus que le salaire moyen, pour pouvoir acheter …un appartement de 40 mètres carrés. Il y a vingt ans, il en fallait la moitié, à peine 50 000 euros.

Pas étonnant dans ces conditions que la capitale se vide inexorablement de ses habitants. Sans un apport conséquent, les primo-accédants n’ont plus la possibilité de s’y installer. Et dans les beaux quartiers, ce sont les investisseurs étrangers qui récoltent les belles affaires. Une spirale qui fait plonger tout le secteur du logement.
Résultat : les demandes de permis de construire dégringolent, en recul de 11,45 % depuis un an, suivi par celui des chantiers qui chute de 8,3 %.

Tout a commencé avec la guerre en Ukraine et le renchérissement des prix des matériaux de construction. Tout a continué avec la hausse des taux d’intérêt et le rétrécissement de la capacité d’emprunt des Français : «lLa catastrophe annoncée est arrivée », s’alarme le Président de la Fédération française du bâtiment (FFB).

Face à cela, nos responsables politiques ont pris quelques mesurettes loin d’être à la mesure de l’enjeu, comme le prolongement du prêt à taux zéro d’Élisabeth Borne ou une contribution de la Caisse des Dépôts (CDC) à la relance de la construction. Le 9 mai, le ministre délégué à la Ville et au Logement Olivier Klein proposera de nouvelles pistes après avoir procédé aux consultations que lui a réclamées Emmanuel Macron.

L’enjeu est considérable. Outre les 100 000 emplois directement menacés, c’est la possibilité ou non pour les Français de pouvoir se loger qui est sur la table.
Après la grande colère sur les retraites, ils veulent bien se retrouver dans la rue. Pas à la rue.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique