De Gaza à Téhéran, la logique de guerre
Il n’aura pas fallu deux mois pour que Trump change de costume : de « peacemaker », le voilà devenu « va-en-guerre ». Avec l’Iran en ligne de mire…

En vingt-quatre heures le président américain vient de donner son aval pour la reprise des bombardements sur Gaza, tout en ordonnant des frappes américaines sur les zones contrôlées par les rebelles houthis du Yémen. Les Houthis avaient ciblé à trois reprises le porte-avions Harry Truman qui croise en mer Rouge. Le patron de la Maison-Blanche a donné l’ordre aux F16 de frapper les zones contrôlées par les rebelles où se trouvent plusieurs agglomérations. L’escalade ne date pas d’hier. Les rebelles houthistes soutenus par Téhéran harcèlent les navires américains avec des drones et des missiles iraniens. Plus récemment, ils ont menacé de s’en prendre aux navires israéliens.
La riposte militaire de Washington contre les Houthis est surtout un message à l’adresse du régime des Mollahs. Voici une semaine, Donald Trump a envoyé une lettre au guide suprême Ali Khamenei. Comme à son habitude il l’avertissait de possibles actions militaires si Téhéran refusait de reprendre les pourparlers sur la question nucléaire. En réponse l’ayatollah Ali Khamenei a jugé « imprudentes » les intimidations de Trump, ajoutant que « l’Iran est capable de riposter ».
Entre le président américain et le « guide suprême », une deuxième manche commence. Lors de son premier mandat (2017-2021), Trump s’était retiré de l’accord nucléaire conclu en 2015. On avait confié à l’AIEA le soin de vérifier que Téhéran ne puisse pas fabriquer des engins nucléaires. Dans sa réponse au récent courrier de Washington, Khamenei fait une claire allusion à cet épisode. « Nous avons négocié des années et cette même personne a jeté l’accord finalisé, il l’a déchiré ». Depuis son retour aux affaires, Trump a dans l’idée de mettre une « pression maximale » sur Téhéran pour relancer les discussions sur le nucléaire.
Cette stratégie a été approuvée depuis longtemps par Benyamin Netanyahou. Si souvent dénoncé par le premier ministre israélien, « l’axe du mal » formé par les Houthis, le Hezbollah, le Hamas et le régime de Téhéran refait donc surface, le jour même où la trêve vole en éclat à Gaza. En vigueur depuis le 19 janvier celle-ci devait entrer dans une seconde phase pour permettre la libération des derniers otages. Jérusalem accuse le Hamas de ne pas vouloir libérer les derniers otages, le Hamas reproche aux israéliens de refuser un cessez-le-feu définitif.
Pour Israël, les objectifs de la nouvelle escalade n’ont pas changé par rapport aux treize mois de la première période. « Nous ne cesserons pas de combattre tant que tous les otages ne seront pas rentrés chez eux et que tous les objectifs de la guerre ne seront pas atteints » martèle Israël Katz, le ministre de la défense. On ne saurait mieux reconnaitre l’échec complet de Netanyahou sur la première phase qui avait été justement lancée pour libérer les otages et éradiquer le Hamas.
Une chose a changé en revanche, l’opinion israélienne reste en faveur de la poursuite de la trêve. Il y a aujourd’hui 58 otages israéliens dont 35 présumés mort selon un décompte de l’armée. Pour le Forum des familles d’otages et disparus le pire vient d’arriver : « le gouvernement israélien a décidé d’abandonner les otages ».
Déjà, plus de 400 palestiniens ont été tués dans l’enclave soumise à un blocus humanitaire complet depuis sept jours. Parmi les victimes, plusieurs hauts responsables palestiniens dont Essam Al-Dalis, le chef du gouvernement de l’enclave de Gaza.
Ce mardi de bombardement sans relâche, Benyamin Netanyahou devait en principe se rendre à une audience judiciaire dans le cadre de son procès pour corruption. Elle a été reportée à la demande de ses avocats. Ce même jour, le parti d’extrême-droite dirigé par Itamar Ben-Gvir a repris sa place au sein du gouvernement de coalition. Il avait démissionné le 19 janvier, lors de l’entrée en vigueur de la trêve. Le voilà de nouveau à son poste de ministre de la Sécurité Nationale. Sans surprise, il pourra suivre et appuyer la colonisation rampante de la Cisjordanie. Quant à Benyamin Netanyahou, il échappe aux poursuites tant qu’il reste premier ministre. CQFD.